U.S-Africa Leaders Summit : Washington déroule le tapis rouge et multiplie les engagements pour l’Afrique

Une vingtaine de chefs d'Etat et de délégations d'une cinquantaine de pays africains sont présents à Washington D.C pour prendre part à la deuxième édition de l'U.S-Africa Leaders Summit qui se déroule du 13 au 15 décembre 2022 dans la capitale fédérale américaine.

Du 13 au 15 décembre, la capitale des Etats-Unis d’Amérique accueille la seconde édition de l’U.S-Africa Leaders Summit qui se tient 8 ans après celui de 2014 et en présence d’une cinquantaine de délégation de pays africains et de l’Union africaine (UA). A cette occasion, l’administration du Président Biden n’a pas lésiné sur les moyens pour une nouvelle opération de séduction à l’endroit du continent avec des engagements de soutien pour une plus grande intégration dans les organisations internationales notamment le G20 ainsi que des annonces de financements dont 55 milliards de dollars pour les trois prochaines années à travers leur nouvelle stratégie africaine destinée à renforcer la coopération entre les deux parties et à stimuler le développement économique du continent.

America is back to Africa! C’est à tout point de vue, le message que les Etats-Unis veulent passer avec la tenue de la seconde édition de l’U.S-Africa Leaders Summit qui se tient du 13 au 15 décembre 2022 à Washington D.C, la capitale américaine. Près d’une cinquantaine de délégation conduite par les dirigeants au plus haut sommet de l’Etat des pays africains ainsi que de l’organisation continentale ont été conviés à l’évènement qui se tient huit années après la première édition qui s’est tenue en 2014 sous l’administration Obama. A cette occasion, l’administration du Président Joe Biden a sorti le grand jeu pour une véritable opération de charme à l’endroit des dirigeants africains avec plusieurs panels sur les priorités actuelles de l’Afrique, des rencontres entre les officiels des deux parties, des signatures des contrats et de partenariat dans divers domaines ainsi que des échanges avec les responsables des différents pays, une réception au Congrès et un dîner d’Etat à la Maison Blanche en l’honneur des chefs d’Etat et de délégations pour clôturer le Sommet. Au cours de cet évènement qui, trois jours durant, va réunir dans la capitale américaine des personnalités de tout le continent africain qui discuteront des moyens audacieux et concrets de renforcer les liens et de faire progresser les priorités communes entre les USA et les pays africains, plusieurs sessions sont prévues. Elles porteront notamment sur les thèmes relatifs à la diaspora et les jeunes leaders africains, la santé mondiale et la sécurité alimentaire, le changement climatique et l’énergie, les investissements dans les infrastructures.

« J’attends avec intérêt de travailler avec les gouvernements africains, la société civile, les communautés de la diaspora aux États-Unis et le secteur privé pour continuer de renforcer notre vision commune de l’avenir des relations américano-africaines », a ainsi déclaré le chef de l’exécutif américain en prélude à l’ouverture des travaux.

L’un des évènements phares du Sommet, c’est l’U.S-Africa Business Forum, au cours duquel les chefs d’État et les responsables américains et africains des milieux d’affaires et des pouvoirs publics discutent des moyens de faire progresser des partenariats mutuellement bénéfiques pour créer des emplois et stimuler une croissance inclusive et durable. L’occasion pour le président Joe Biden de faire la promotion des partenariats et des investissements stables et fiables que les États-Unis ont à offrir et qui permettent aux entreprises d’Afrique et des États-Unis de prospérer ensemble.

Des initiatives pour stimuler le commerce et promouvoir le développement économique

Depuis juin 2019, ont annoncé les organisateurs, le gouvernement américain a aidé à conclure plus de 800 accords de commerce et d’investissement bilatéraux concernant 45 pays africains, d’une valeur estimée à 50 milliards de dollars en exportations et en investissements. Ces accords ont été mis en œuvre dans le cadre de « Prosper Africa », une initiative du gouvernement des États-Unis qui tire parti des services et des ressources de 17 agences gouvernementales américaines pour accroître le commerce et les investissements bilatéraux entre les États-Unis et les pays africains.

Bien que l’Afrique ait été peu présente ces dernières années dans la diplomatie africaine, notamment sous la présidence Trump, les Etats-Unis disposent de véritables leviers pour renforcer leur partenariat avec l’Afrique et sur lesquels l’administration Biden entend s’appuyer pour accompagner sa nouvelle offensive sur le continent. Il s’agit notamment de l’initiative « Power Africa » dans le domaine de l’énergie, « PREPARE » dans le domaine du changement climatique, le Millenium Challenge Corporation (MCC) pour la lutte contre la pauvreté et l’accélération de la croissance économique et surtout l’African Growth and Opportunity Act (AGOA). Cette loi qui a votée en 2000 sous l’administration de Bill Clinton a été fondée sur le principe « Trade not aid » avec comme l’objectif est d’aider l’Afrique à intégrer les circuits économiques mondiaux à travers la facilitation des exportations africaines vers les USA. Elle a ainsi ouvert le marché américain en franchise de douane pour près de 1.800 produits, essentiellement le textile et les hydrocarbures provenant des pays africains éligibles. Les critères d’éligibilité à l’AGOA s’étendent de la mise en place d’une économie de marché à l’instauration d’un véritable état de droit et à la promotion du pluralisme politique ainsi que le renforcement des libertés. Depuis sa mise en œuvre, une quarantaine de pays d’Afrique subsaharienne ont été jugés éligibles et après avoir été prolongé, elle devrait arriver à échéance en 2025.

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 Selon les organisateurs, le Sommet devrait être l’occasion de la renforcer et de la prolonger afin de soutenir le développement économique du continent et promouvoir son intégration dans le commerce mondial notamment avec la réduction de taxes à l’importation pour les produits africains mais aussi en profitant de l’intégration croissante de l’Afrique à travers la mise en œuvre progressive de la Zlecaf. A cet effet, une réunion ministérielle sur l’AGOA est prévue dans le cadre du Sommet avec secrétaire d’Etat américaine en charge du commerce, Katherine Tai, et les ministres du Commerce et représentants des chambres de commerce et d’industrie du continent. Selon plusieurs études et spécialistes, l’Afrique n’a pas su ou pu pleinement tirer le maximum de profit des opportunités offertes par cet accord en raison de divers obstacles et les discussions qui seront menées devraient permettre de parvenir à la révision de l’AGOA pour un accord commercial plus avantageux pour les pays africains.

 «US strategy towards subsaharan Africa », la nouvelle stratégie des USA en Afrique

Selon les services de la Maison Blanche et conformément à l’agenda du Sommet, cette rencontre entre le Président américain et ses homologues africains sera l’occasion pour les Etats-Unis de dévoiler en détails leur nouvelle stratégie en Afrique, « US strategy towards subsaharan Africa », dont les grands contours ont été rendu public en août dernier. Selon le document, cette nouvelle stratégie qui se base sur partenariat d’égal à égal entre les deux parties, vise comme entres autres priorités, les défis de l’heure de l’Afrique notamment la promotion de la démocratie et de la bonne gouvernance, la santé, la sécurité, le développement économique ainsi que la transition et les enjeux climatiques.

La nouvelle stratégie américaine en Afrique sera déployée sur les cinq prochaines années et à la veille du Sommet, le conseiller à la sécurité nationale du président américain Jake Sullivan a annoncé que les États-Unis « vont consacrer 55 milliards de dollars à l’Afrique sur trois ans », des fonds qui seront notamment consacrés à la promotion des sociétés ouvertes à l’économie mondiale, à la gestion des besoins sanitaires et aux réponses au changement climatique. Le haut responsable américain n’a toutefois pas donné plus de détails sur la provenance des fonds ainsi que leur répartition indiquant que les objectifs visés seront déterminés lors du Sommet de Washington.

« L’esprit de ce Sommet n’est pas de définir ce que nous allons faire pour l’Afrique et les populations africaines mais plutôt ce que nous allons faire ensemble avec l’Afrique et les populations africaines », s’est défendu Jake Sullivan qui a, toutefois laissé entendre, que les nouvelles priorités et objectifs de la stratégie américaine seront alignées sur celles l’Agenda 2063 de l’Union africaine (UA).

Offensive de charme et stratégie d’influence

Au-delà des initiatives commerciales et économiques, la sécurité occupera une bonne partie des discussions, notamment concernant le Sahel, ainsi que des questions d’actualités notamment la guerre en Ukraine qui ne manquera pas de s’inviter aux débats. Il est important de le souligner, si les responsables américains mettent en avant le poids croissant de l’Afrique comme un acteur géopolitique majeur qui possède certaines des économies à la croissance la plus rapide du monde pour justifier leur nouvelle offensive sur le continent, certains analystes voient en cette opération de charme, la volonté de Washington de contrer l’offensive de la Chine et de la Russie.

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Les USA ont certes indiqué que le nouveau partenariat se fera sous aucune condition de positionnement et les dirigeants africains ont insisté sur leur volonté de continuer à diversifier leurs partenariats. Pour preuve de bonne foi, le président américain, Joe Biden, plaidera au cours de ce sommet pour l’intégration permanente de l’Union africaine au G20, comme l’a annoncé, la semaine dernière, Judd Devermont, le directeur exécutif aux Affaires africaines du Conseil de sécurité nationale de la Maison Blanche. Selon d’autres observateurs, cela devrait permettre à l’administration américaine d’obtenir plus facilement la coopération de l’Afrique sur des questions telles que la guerre en Ukraine et le changement climatique. Dans un cas comme dans l’autre, les dirigeants africains qui se savent très courtisé dans cette guerre géopolitique qui ne dit pas son nom, profitent également pour solliciter l’appui des Etats-Unis pour au moins un siège permanent au sein du Conseil de sécurité des Nations unies.