Chronique : Face aux investisseurs prédateurs l’Afrique doit privilégier le modèle aménageur-développeur

Dénommé BlueEarth Credit Strategies II, ce fonds de crédit soutenu par une base d’investisseurs internationaux réalisera des acquisitions stratégiques dans une diversité de secteurs, sur 3 continents.

Le déficit d’infrastructures a fini par rendre un certain nombre de pays africains, la chasse-gardée de puissances qui y délocalisent des industries lourdes, y établissent ports et terminaux à conteneurs… au détriment de leur souveraineté économique. Il existe pourtant des solutions pour des implantations en  » Plug and Play « , à condition que de trouver des zones préalablement aménagées.

L’ère des terres vierges à conquérir doit être révolue en Afrique. Ce moment où un riche investisseur, cheminant le long d’un littoral, crie  » Eureka !  » tel Archimède dans sa baignoire,  » Voici l’endroit idéal pour implanter mon port, annexé d’un terminal à conteneurs «  doit nous interpeller tous ! Nous ne sommes plus à l’époque où cet ingénieur commercial de Bata revenant d’une tournée africaine confiait à son supérieur, « Il n’y a rien à faire là-bas, ils marchent tous pieds nus !  » Vous connaissez la suite … le PDG de Bata, en opportuniste, rétorqua qu’au contraire, c’est The Place to Be !

Si pour Bata, qui prit le temps d’adapter ses productions aux tailles modales, à l’environnement, au pouvoir d’achat… ce fut un grand succès, jusqu’à ce que la concurrence renverse la tendance, cependant les investisseurs actuels, qui comptent profiter au maximum d’une absence d’infrastructures ou imposer des taux prédateurs, ne prennent même pas la peine de se concerter avec les locaux, d’épouser les stratégies locales de développement, n’étudient pas l’environnement… Ils ne se fondent que sur des constats empiriques rapides pour prendre des décisions aux conséquences souvent désastreuses. Celui, qui ne se concentre que sur une belle baie, sans se retourner et avoir une connaissance approfondie de l’arrière-pays, peut opter pour remblayer des aires humides au lieu d’assécher des marécages ! En choisissant la seconde solution, il sauvegarde un écosystème permettant aux eaux terrestres de ruissellement et marines de communiquer de façon permanente. Ceci est un exemple parmi tant d’autres investissements envisagés, réalisés ou en cours de l’être.

A chaque terroir, un type d’investissement

Pour éviter autant d’impairs, nos Etats africains peuvent créer des structures, financées par une partie des fonds de caisses de pension, de dépôts et de consignations. Véritables Aménageurs-développeurs, ces entités auraient pour missions, en conformité avec les plans de développement stratégique et compte tenu des avantages comparatifs de chaque terroir, d’ériger ports, aéroports, zones industrielles intégrées, zones économiques spéciales, agropoles, haliopoles, aéropoles, giga-usines d’énergie de transition… dotés de toutes les utilités et commodités y compris la fibre optique. L’Etat africain, qui aura pris la peine de créer de telles structures, sera sevrer d’un investisseur qui pourrait l’amadouer avec la réalisation d’une très étroite route goudronnée, l’implantation d’un dispensaire… Une des premières conséquences sera la disparition d’octroi de terrains nus aux investisseurs qui s’auto-érigent en colons de facto !

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Parmi les nombreux avantages d’aménageurs-développeurs, un saut qualitatif dans l’attractivité de la destination, plus de valeur ajoutée, des filières industrielles voire agro-industrielles intégrées (de l’amont à l’aval, ex. : de la betterave au sucre raffiné, sans omettre la logistique). Toutes les zones où seraient domiciliées ces infrastructures gagneront en notoriété, en échanges et génèreront des milliards de dollars de revenus dans des villes satellites. A l’image de places ou bourses internationales, telles que Londres, Tokyo, Chicago, des matières premières, des pierres précieuses, elles seront de grands centres. Dois-je rappeler que le Chicago Mercantile Exchange, élément clé de l’infrastructure financière américaine, qui fut au début de sa création un marché pour le règlement des contrats à terme agricoles, est devenue une plaque tournante majeure pour les Bons du Trésor, les crypto-monnaies, métaux précieux, les devises étrangères et de nombreux types de produits dérivés ? 

Publié pour la première fois le 05/03/2023

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