Dette en Afrique du Nord : Kristalina Georgieva tire la sonnette d’alarme

Le FMI a publié ses dernières prévisions il y a deux semaines ; elles sont certes moins sombres que celles du mois d’octobre, mais annoncent toujours un ralentissement de la croissance, et une lutte contre l’inflation en priorité pour 2023. Cette dernière passera de 8,8 % en 2022 à 6,6 % cette année, et à 4,3 % en 2024

La dette publique au Moyen-Orient et en Afrique du Nord est une « préoccupation », nécessitant une stratégie budgétaire, selon le FMI qui s’est penché sur les enjeux et menaces qui pésent sur la région. Il s’agit de renforcer la résilience des finances publiques pour protéger less populations et les économies de la région tout menant des actions en faveur de l’envionnement.

La dette publique de certains États du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord (MENA) est  « préoccupante » et les gouvernements gagneraient à renforcer leur résilience par le biais de politiques budgétaires pour se protéger contre les chocs en période d’incertitude, a déclaré dimanche la cheffe du Fonds monétaire international (FMI) Kristalina Georgieva. La croissance mondiale reste faible, mais il se peut qu’elle soit à un tournant a-t-elle rappelé. Après une expansion de 3,4 % l’an dernier, le FMI prévoit son ralentissement à 2,9 % en 2023, avant de se redresser légèrement pour atteindre 3,1 % en 2024. L’institution de Bretton Woods a publié ses dernières prévisions il y a deux semaines ; elles sont certes moins sombres que celles du mois d’octobre, mais annoncent toujours un ralentissement de la croissance, et une lutte contre l’inflation en priorité pour 2023. Cette dernière passera de 8,8 % en 2022 à 6,6 % cette année, et à 4,3 % en 2024 ; pour autant, dans la plupart des pays, elle restera supérieure aux niveaux observés avant la pandémie. L’évolution est encourageante, mais les risques de dégradation persistent, à cause des doutes sur la reprise de l’économie chinoise. L’inflation pourrait ainsi rester plus élevée que prévu, ce qui nécessiterait un durcissement encore plus important de la politique monétaire, au risque d’une réévaluation brutale des actifs sur les marchés financiers. Aussi toute intensification de guerre Russo-ukrainienne peut fragmenter encore davantage l’économie mondiale.

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À mesure que l’économie mondiale ralentira, la croissance devrait aussi chuter au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, pour passer de 5,4 % en 2022 à 3,2 % cette année, avant de remonter à 3,5 % en 2024. Les baisses de production décidées par l’OPEP+ pourraient réduire les recettes globales des pays exportateurs de pétrole. Ce qui risque de conduire les pays importateurs de pétrole à des difficultés persistantes. La dette publique est particulièrement préoccupante : plusieurs pays de la région présentent des ratios dette/PIB élevés, dont certains avoisinent les 90 %. En outre, pour la quatrième année consécutive, l’inflation devrait dépasser les 10 % dans la région, au-dessus de la moyenne mondiale. Pour les pays émergents et les pays à faible revenu de la région, cette situation tient aux effets prolongés de la hausse des prix des denrées alimentaires ; dans certains cas, la dépréciation des monnaies nationales joue également un rôle.

« Nous nous inquiétons des risques qui pèsent sur la région. La guerre que la Russie livre à l’Ukraine et des catastrophes climatiques pourraient aggraver les effets des pénuries alimentaires sur les plus fragiles. Qui plus est, le chômage reste très élevé, notamment chez les jeunes : dans ces conditions, les sociétés courent un risque considérable de déstabilisation ».

Elle a mis en avant trois principes directeurs pour aider les pays à renforcer leur résilience en mobilisant leur politique budgétaire. Il s’agit d’abord de se doter d’un cadre solide pour la conduite de la politique budgétaire et la gestion des risques budgétaires. Dans un monde marqué par les chocs et l’incertitude, la conduite de la politique budgétaire gagne en importance, mais aussi en complexité. Pour y parvenir, le Maroc élimine progressivement les subventions onéreuses et non ciblées pour les remplacer par des aides sociales ciblées. La Mauritanie a décidé d’ancrer sa politique budgétaire sur un niveau de référence pour surmonter la volatilité des recettes qu’elle tire de ses exportations minières ; elle a également augmenté les prix des combustibles de 30 % en réduisant les subventions. Enfin, certains pays exportateurs d’énergie profitent des périodes où les cours sont élevés pour constituer des réserves, afin de mieux affronter la volatilité des prix du pétrole.

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Les États doivent également composer avec de nombreux risques budgétaires qui pourraient découler, notamment, des garanties publiques et des pertes essuyées par les entreprises d’État ; ces risques peuvent aggraver l’endettement et forcer les pouvoirs publics à réduire des dépenses pourtant vitales. Pour mieux y faire face, l’Égypte améliore le suivi de ce type de risques. En outre, plusieurs pays arabes adoptent des cadres budgétaires à moyen terme réalistes. Le deuxième principe consiste à planifier et à investir sur le long terme pour surmonter les difficultés liées au changement climatique. De l’Afrique du Nord à l’Asie centrale, la région se réchauffe deux fois plus vite que le reste du monde. Selon le FMI, pour accroître la capacité d’adaptation de la région, il est essentiel que les pays investissent dans des infrastructures résistantes aux effets du changement climatique et dans des systèmes d’alerte précoce. Les investissements dans les énergies renouvelables et la décarbonation de l’économie des pays de la région sont tout aussi indispensables.

« Les autorités des pays de la région ont chiffré à plus de 750 milliards de dollars leurs besoins de financement pluriannuels en la matière. De tels besoins ne seront satisfaits qu’à condition que des politiques publiques et des solutions financières judicieuses soient mises en place pour favoriser un climat propice au financement privé de l’action climatique ».

Le troisième principe identifié par le FMI consiste à accroître les recettes fiscales. Pour investir dans un avenir plus résilient, l’organisme bancaire recommande de renforcer davantage les politiques et les administrations fiscales.De nombreux pays de la région ont nettement augmenté leur capacité fiscale. Pourtant, le ratio moyen impôts/PIB, hors recettes tirées des hydrocarbures, n’est encore qu’à environ 11 %, ce qui représente moins de la moitiédes recettes fiscales potentielles.

 Approfondir la coopération internationale

Cependant, le niveau d’endettement de certains pays n’est pas viable, et les autorités nationales ne peuvent pas résoudre seules ce problème urgent. Le poids de la dette pèse sur les dépenses de santé, d’éducation et d’infrastructures ; cette situation frappe les populations les plus fragiles, mais il s’agit aussi d’un problème commun à la région et au monde entier. « Dans ce domaine, l’esprit d’équipe doit prévaloir : le nombre de créanciers publics et privés est si élevé que seule la coopération multilatérale peut permettre de rétablir la viabilité de la dette », a conclu la directrice du FMI.

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