Chronique – Sommet de Paris : nouveau pacte financier mondial ou l’assurance de débouchés à l’industrie européenne décarbonée ?

Le président français Emmanuel Macron (c), et ses homologues brésilien Luiz Inacio Lula Da Silva (g) et égyptien Abdel Fattah al-Sissi (d), lors du Sommet "pour un nouveau pacte financier mondial", le 23 juin 2023 à Paris (Lewis Joly).

A Paris, la capitale française s’est achevée la semaine dernière le Sommet pour un nouveau pacte financier mondial. Sous les desseins d’orienter la finance internationale au service du climat, des vœux pieux et de subtiles transactions pour éviter à l’Union européenne un dumping écologique.

Au récent Sommet pour un nouveau pacte financier mondial, tenu à Paris les 22 et 23 juin 2023 et qui a connu la présence d’une quarantaine de chefs d’états et de gouvernements, les déclarations l’ont emporté sur du concret. Face à des besoins, estimés à hauteur de 27 000 milliards de dollars d’ici 2030, selon des sources sures, les PMA et pays émergents sont loin du compte. Les pays riches, devant injecter 100 milliards de dollars par an depuis la COP de Copenhague, n’ont pas tous joué le jeu. La réallocation de ce montant en DTS depuis 2021 par des pays riches n’a pas non plus fait l’affaire. Excepté un mécanisme de suivi des engagements, une prochaine refonte des institutions de Bretton Woods et quelques mesurettes, le nouveau pacte financier n’aura pas ratissé large. Faire payer les plus grands pollueurs a été aux oubliettes. Les sources de financement nouveaux portent sur une éventuelle taxation sur les billets d’avion sur le transport maritime… Certes le Sénégal et la Zambie ont pu bénéficier de mesures concrètes, respectivement un partenariat pour une transition énergétique équitable, à hauteur de 2,5 milliards de dollars, avec un groupe de pays développés et des banques multilatérales de développement pour atteindre 40 % d’EnR en 2030, et une restructuration de la dette de 6,3 milliards de dollars, plus de 2 ans après le défaut de paiement. Kristalina Georgieva, DG du FMI, Ajay Banga, nouveau président de la Banque mondiale, et Mia Mottley, PM de la Barbade, ont plaidé pour ces nouvelles méthodes. De toute évidence, les présidents sud-africain Cyril Ramaphosa, et Kenyan William Ruto, veulent de profonds changements qui privilégient coopération et partenariat.

La taxe carbone en toile de fond

Il ne faut pas perdre de vue que l’orientation souhaitée par ce nouveau pacte financier va d’abord profiter à l’industrie européenne. Dois-je rappeler que le mécanisme carbone aux frontières (MCFA) ou en anglais, Carbon Border Adjustment Mechanism (CBAM), est une proposition politique de l’Union européenne, visant à réduire les émissions de carbone associées aux importations de produits provenant de pays où les réglementations climatiques sont moins strictes. Ce principe du MCFA, qui repose sur l’idée de créer une taxe carbone sur les produits importés en fonction de leur empreinte carbone, entrera pleinement en vigueur courant 2026. Cette taxe serait calculée en fonction des émissions de gaz à effet de serre générées tout au long de la chaîne de production du produit, depuis son lieu d’origine jusqu’au point d’importation. L’objectif est de réduire les distorsions concurrentielles qui peuvent se produire lorsque certains pays imposent des réglementations climatiques strictes à leurs industries nationales, tandis que d’autres pays avec des normes plus laxistes peuvent produire des biens à moindre coût. Le président Lula Dasilva du Brésil, et le PM chinois Li Qiang étaient présents à Paris…

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Le MCFA vise à inciter les pays qui exportent vers des régions où des réglementations climatiques strictes sont en place à réduire leurs émissions de carbone, en appliquant une taxe sur les produits importés qui ne respectent pas ces normes. Cela peut encourager les entreprises étrangères à adopter des pratiques plus durables sur le plan environnemental et à investir dans des technologies à faible émission de carbone. L’objectif de l’UE est de s’assurer que les industries européennes ne soient pas désavantagées par rapport à leurs concurrents étrangers qui ne sont pas soumis à des réglementations climatiques aussi strictes. Ces dernières années, le système financier international n’a pas occulté les impacts environnementaux. Le MCFA, qui soulève plusieurs défis et questions complexes, notamment en ce qui concerne la mesure précise de l’empreinte carbone des produits importés, risque aussi de soulever des représailles commerciales de la part des pays touchés. Quels sont ses impacts sur les économies des pays en développement qui exportent avec l’UE et qui ne sont pas encore préparées à la décarbonation de leurs économies. Quid de la mise en œuvre pratique. Au lieu de se focaliser sur une remontée de fonds alloués au mix énergétique à fort taux d’EnR, bénéficiant à l’industrie européenne, sous prétexte de contrer du dumping écologique, il est nécessaire d’asseoir une coordination internationale, du transfert de technologie, une mise à niveau industrielle…

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