Chronique- L’Afrique dit oui au co-développement !

Le succès des partenariats sur l’énergie bas carbone et des nouveaux financements en Afrique dépendra d’une approche holistique qui intègre le transfert de technologie, le renforcement des capacités, la mobilisation de capitaux diversifiés (publics et privés), une gouvernance équitable. Derrière, il faut une véritable volonté de co-développement, axée sur les besoins et les opportunités spécifiques du continent.

L’Afrique, qui a un potentiel immense pour le développement de l’énergie bas carbone, peut grandement bénéficier de partenariats de co-développement. Cependant, la mise en œuvre effective de ces partenariats et la mobilisation des financements nécessitent des approches stratégiques et innovantes.

Il est d’abord utile d’intégrer que le co-développement implique un véritable partage. Les partenaires doivent s’engager à transférer les technologies de pointe. Cela inclut la formation et le renforcement des capacités locales. Plutôt que de simplement importer des équipements, les partenariats doivent encourager la production locale, par exemple de composants d’énergies renouvelables, la création d’emplois verts et le développement d’industries connexes.

A l’heure actuelle, je trouve que les partenariats doivent cibler l’accès à l’énergie pour les populations non connectées aux réseaux nationaux, notamment via le développement de mini-réseaux et de solutions hors réseau. L’objectif est d’assurer un accès universel à des services énergétiques modernes et durables.

Dans la filière Energie bas carbone, il est possible de valoriser le potentiel africain. Notre continent dispose d’énormes ressources en énergies renouvelables (solaire, éolien, hydroélectrique, géothermique). Les partenariats doivent viser à maximiser l’exploitation de ces ressources.

L’Afrique au sud du Sahara a le plus fort potentiel solaire au monde. Des projets à grande échelle et des solutions décentralisées (mini-réseaux, kits solaires domestiques) peuvent être développés avec des partenaires internationaux. Même son de cloche sur l’hydroélectricité, l’éolien ou le géothermique Des barrages hydroélectriques, tout en respectant les normes environnementales et sociales, peuvent fournir une énergie stable, tandis que certaines régions côtières et intérieures offrent des conditions idéales pour l’énergie éolienne. Quant à la géothermie, des pays comme le Kenya ont déjà démontré un grand potentiel.

Le corollaire serait que l’Afrique puisse exporter des crédits carbones de haute qualité, générant ainsi de nouvelles sources de revenus et incitant à des projets bas carbone.

Nouveaux financements du développement

Le déficit de financement pour l’action climatique en Afrique est significatif. Pour y remédier, plusieurs mécanismes peuvent être explorés.

Avec le financement mixte ou Blended Finance, il est possible de combiner des fonds publics (subventions, prêts concessionnels des banques de développement) avec des capitaux privés, pour réduire les risques perçus par les investisseurs et rendre les projets plus attractifs. Le Fonds pour l’Énergie Durable pour l’Afrique (SEFA) de la Banque Africaine de Développement (BAD) ou le Fonds Vert pour le Climat (FVC) sont de parfaits exemples.

Dans nos pays, les autorités peuvent initier ou encouragerla création et le renforcement de banques vertes régionales ou nationales, ainsi que de fonds d’investissement dédiés au climat, peuvent canaliser les capitaux vers des projets d’énergie bas carbone.

Avec la mobilisation des ressources intérieures, notamment sur les marchés financiers africains ou en introduisant une taxe carbone et les mécanismes y afférents, des marchés obligataires locaux (notamment les obligations vertes) et des Bourses peuvent être développés pour financer des projets d’énergie renouvelable. En effet, mis en place, des mécanismes de tarification du carbone pourront générer des revenus, dédiés aux investissements bas carbones.

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Encouragement de PPP pour les infrastructures énergétiques, en définissant des cadres réglementaires clairs et incitatifs pour le secteur privé, l’adoption d’approche dette contre climat, via des mécanismes d’échange de dette contre des investissements climatiques, permettraient aux pays africains de réduire leur endettement, en échange d’engagements financiers dans des projets bas carbone.

Au-delà de l’atténuation (réduction des émissions), un financement accru est nécessaire pour l’adaptation aux impacts du changement climatique, souvent liés à la transition énergétique (infrastructures résilientes, gestion de l’eau).

Quel co-développement ?

Le co-développement implique une relation équitable et mutuellement bénéfique, loin des dynamiques traditionnelles d’aide au développement.

A mon avis, l’approche doit être axée sur les besoins et les priorités africaines.Les partenariats doivent être définis en fonction des stratégies de développement nationales et régionales africaines, et non imposés de l’extérieur. En outre, la gouvernance doit être partagée et la prise de décision conjointe. Les pays africains doivent être des acteurs à part entière dans la conception, la mise en œuvre et le suivi des projets, avec une véritable appropriation locale.

Toutefois, pourpouvoir gérer et piloter des projets complexes d’énergie bas carbone, il est nécessaire de renforcement ses capacités institutionnelles. Investir dans le renforcement d’institutions africaines, telles qu’agences de régulation, banques de développement, centres de recherche… nous sera fort utile.

Par ailleurs, l’intégration régionale, qui favorise les projets transfrontaliers d’interconnexion électrique et de développement de parcs énergétiques à l’échelle régionale, permettra d’optimiser l’utilisation des ressources et renforcer la sécurité énergétique du continent.

A mon sens, une des clés de la réussite du co-développement est à trouver dans l’investissement dans l’innovation et la R&D.Encourager la collaboration en matière de R&D pour développer des solutions énergétiques, adaptées aux contextes africains, notamment les technologies de stockage et les mini-réseaux intelligents, reste une piste idoine.

Afin que la mayonnaise prenne, établissons des plateformes de dialogue régulières entre partenaires africains et internationaux. Ce dialogue politique continu nous permettrait de discuter des défis, partager les meilleures pratiques et ajuster les stratégies de co-développement.