Chronique- Stratégies contre les investisseurs étrangers boulimiques de terres

A travers le monde, plusieurs pays ont pris des mesures strictes contre la spéculation immobilière émanant d’étrangers. Des restrictions ou des interdictions sur l’achat de terres par des étrangers font légion. La situation peut varier, selon le type de terrain agricole, urbain, etc. Elle peut aussi dépendre du statut de l’étranger résident ou non-résident. Certes les lois peuvent évoluer, mais en général, ces Etats ne sont pas très peuplés ou craignent l’inflation ou encore que leurs ressortissants soient défavorisés par des investisseurs plus nantis, venus d’ailleurs.

Il ne faut pas croire qu’un investisseur étranger peut se réveiller un jour et aller acquérir un terrain dans n’importe quelle partie du monde. A côté d’Etats qui bradent leurs terres pour une bouchée de pain, d’autres mettent en place des mesures strictes. Les niveaux de développement étant inégaux, de nombreux pays initient des stratagèmes pour préserver leurs terres et éviter que leurs ressortissants ne soient lésés par une quelconque spéculation, venue d’ailleurs. A côté de ceux qui appliquent une interdiction totale, d’autres optent pour une partielle, voire des conditionnalités.

Au Gabon, pays de 267 667 km2, mais peuplé d’à peine 2,5 millions d’habitants, la vente de terres est interdite aux étrangers, sous réserve de dérogations prévues par la loi. Même son de cloche au Burkina Faso, où les non nationaux ne peuvent pas acheter des terres agricoles, mais peuvent recourir à des baux emphytéotiques pour investir dans l’agriculture.

Afin de limiter l’inflation, c’est aussi le cas en Nouvelle-Zélande qui interdit l’achat de biens immobiliers par des étrangers et des non-résidents. Au Mexique, il est formellement interdit aux étrangers de posséder un bien sur le territoire dans certaines « zones restreintes », notamment près des côtes ou des frontières. Cependant, des mécanismes, comme le fideicomiso (fiducie bancaire), permettent d’assouplir cette restriction dans ces zones. A noter que dans ce pays l’achat est libre dans des zones non restreintes.

Aussi, au Maroc, les étrangers ne peuvent pas acheter directement des terres agricoles. Cependant, il existe des mécanismes, comme la location à long terme (baux emphytéotiques) ou l’acquisition via une société marocaine, pour contourner cette restriction, sous certaines conditions. L’achat de terrains en zone urbaine est généralement permis.

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Parmi ceux qui interdisent l’achat de terres agricoles aux étrangers, il faut compter aussi l’Estonie, la Hongrie, la Lettonie, la Lituanie et la Slovaquie, où les citoyens non membres de l’UE/EEE ne peuvent pas acheter des terres agricoles. Au sein d’autres pays, tels que l’Albanie, la Croatie, la Macédoine et la Serbie, les citoyens de l’UE/EEE sont soumis à des restrictions pour acheter des terres agricoles.

Toujours dans le lot des interdictions, le Canada a récemment interdit aux étrangers d’acheter des biens immobiliers résidentiels pour une durée temporaire, afin de freiner la spéculation immobilière.

Restrictions et conditions

Quant aux pays qui imposent des restrictions, nous pouvons citer la Thaïlande, où les étrangers ne peuvent pas posséder plus de 49% du sol d’un bien immobilier. Souvent, ils ne sont propriétaires que des murs ou doivent acheter le bien en copropriété avec un local. L’acquisition en pleine propriété est limitée pour les condos.

D’autres Etats ou principautés imposent des conditionnalités. Au Liechtenstein, seuls les résidents peuvent acheter un bien immobilier. A Andorre, en Hongrie, au Danemark, en Islande, en Pologne et à Malte, les investisseurs étrangers doivent obtenir l’approbation des autorités locales pour acheter une propriété.

En Suisse, les citoyens étrangers ne peuvent pas acheter des biens immobiliers de plus de 200 m² ou des terrains de plus de 1 000 m², sauf dans certaines régions spécifiques. En Finlande, ils ne peuvent pas acheter de propriété sur les îles Åland. Dans des pays, comme la Grèce et la Turquie, les citoyens non membres de l’UE/EEE ne sont pas autorisés à acheter des biens immobiliers, à proximité des bases militaires et des frontières nationales.

Cette liste, qui n’est pas exhaustive, prouve que par souci de privilégier leurs ressortissants, limiter la spéculation immobilière ou l’inflation des mesures strictes peuvent être prises pour préserver leurs terres. Dans un pays côtier, tel que le Sénégal, combien de cabanons ont été acquis par des coopérants étrangers pour peanuts, puis revendus à prix d’or, au détriment des locaux qui y avaient aménagé vergers, champs de maniocs, de mil ou de coton pour subsister ?