Le rachat de Twitter Inc. par le milliardaire Elon Musk continue de faire des vagues de par le monde au gré des nouvelles décisions prises ou annoncées par le tonitruant nouveau propriétaire de « l’oiseau bleu ». En Afrique, où le réseau social dispose d’un bureau depuis avril 2021, la saga « Elon Musk » est certes très suivie par de nombreux internautes mais son audience, reste tout de même assez limitée comparativement à ses autres concurrents et risque de s’éroder davantage si le patron de Twitter décide d’aller jusqu’au bout de sa volonté de monétiser l’accès à son réseau social. Il reste qu’avec ses veillietés d’affranchir la plate-forme de toute censure, l’homme le plus riche du monde risque d’avoir fort à faire avec les dirigeants de certains pays où la censure sur les réseaux sociaux est encore de mise. Ce qui, paradoxalement, risque d’accroitre son influence sur le continent…
En Afrique, les premiers pas du milliardaire Elon Musk à la tête de Twitter ont été de mauvais augure. Quelques jours après avoir acheté le réseau social, le 27 octobre dernier pour 44 milliards de dollars, le nouveau patron a annoncé une vague de licenciement qui va concerner près de 50% des effectifs de l’entreprise soit environ 3.700 agents selon les estimations compilées par le cabinet spécialisé Statista Global Consumer Survey, un portail en ligne délivrant des statistiques issues de données d’instituts, d’études de marché et d’opinion. Les premières victimes de cette décision inattendue ont connu leur sort dès la première semaine de la gouvernance d’Elon Musk et n’ont pas épargné le bureau du réseau social dédié à l’Afrique, basé à Accra, au Ghana. Cela ne faisait pourtant que quelques jours que les travailleurs affectés à ce bureau, dont le lancement a été annoncé le 11 avril 2021, venait de reprendre effectivement service à partir de cette antenne en charge d’assurer le développement de « l’oiseau bleu » sur le continent. La plupart des employés de la branche africaine travaillaient, en effet, jusque-là depuis leur domicile et leurs pays respectifs pendant plus d’une année.
« Il y a un an, Twitter est entré en Afrique par le Ghana. Aujourd’hui, nous avons officiellement ouvert le siège africain de Twitter à Accra et, pour la première fois, tous les tweeps (utilisateurs de Twitter) de la région ont quitté leur bureau et se sont réunis pour travailler en équipe. Cela mérite d’être célébré », avait gazouillé le 1er octobre sur le réseau social, Kafui Sokpe, directeur associé principal de Twitter Afrique, chargé de coordonner toutes les activités de la plateforme pour le continent.
Trois jours après ce tweet, plusieurs employés dont ceux du bureau d’Accra ont reçu des lettres officielles de notification de licenciement de la part de la nouvelle direction de l’entreprise ! Le bureau africain de Twitter semble toutefois et jusque-là, relativement épargné par cette première vague de licenciement selon les analystes même si le nombre exact de personnes remerciées demeure encore inconnu. En attendant la suite du processus car le patron de Twitter a été on ne peut plus clair concernant cette réduction des effectifs en cours.
« Malheureusement il n’y avait pas d’autre choix quand l’entreprise perd plus de 4 millions de dollars par mois », a-t-il expliqué
C’est pour l’heure le premier impact sur le continent du rachat de Twitter Inc. par le patron de Tesla qui, depuis sa prise de fonction, gère l’entreprise à coup d’annonces surprenantes comme celle de faire payer les abonnements certifiés pour rentabiliser la société qui, selon-lui, ne génère pas assez de profits. Avec les milliards qu’il vient d’investir et au regard de son passé d’homme d’affaires d’aguerris, il fallait certes s’y attendre mais sur le continent, cela n’a susciter que peu de commentaires chez les internautes.
Malgré une audience assez limitée sur le continent
Il faut dire que malgré ses 229 millions d’utilisateurs actifs quotidiens dans le monde qu’il revendique selon ses propres statistiques publiés en avril 2022, le réseau social à l’oiseau bleu n’a qu’une faible audience en Afrique comparé à ses concurrents TikTok, Instagram ou le très populaire Facebook de Meta. A part l’Afrique du Sud, où il est assez prisé avec 49 % des socionautes qui ont affirmé se connecter régulièrement sur Twitter selon une étude récente de Statista, Twitter est plutôt considéré comme « le réseau social des grandes entreprises et des célébrité ». Il faut dire, comme l’explique un expert des réseaux sociaux, que son offre ne correspond aux besoins des jeunes de 18-24 ans, la frange de la population la plus active sur ces gendres de plateformes dans la plupart des pays africains. L’autre aspect qui explique cette audience assez relative de Twitter sur le continent, c’est le fait aussi qu’il a attendu trop longtemps avant de jeter son dévolu sur le continent. Lancé en 2006, sous la forme d’une plate-forme de microblogging permettant aux utilisateurs de partager de courts messages de 140 puis de 280 caractères, le réseau social a attendu 16 années, en 2021, avant d’annoncer l’ouverture d’un bureau pour ses activités sur le continent alors que depuis 2015, par exemple, Facebook était déjà présent en Afrique avec un bureau à Johannesburg, en Afrique du Sud, puis en 2020 à Lagos au Nigeria. La conjugaison de ces deux facteurs font qu’il sera difficile pour Elon Musk, qui s’est beaucoup endetté pour conclure cette opération, de rentabiliser sa plate-forme su le continent où le marché publicitaire est encore assez dérisoire au regard des fonds investis par les grandes firmes pour le développement de leurs entreprises du secteur des médias sociaux. Il reste que pour l’influent et très médiatique milliardaire, d’autres enjeux sont à considérer sur un continent qu’il sait d’avance prometteur pour y avoir déjà investi dans le secteur des nouvelles technologies et de l’internet…
Une influence qui se fait grandissante
Cette faible audience de Twitter en Afrique comparé à ses concurrents comme Fcaebook s’accompagne toutefois d’une influence loin d’être négligeable au sein de l’opinion africaine. Une influence qui risque de prendre de l’envergure si on se fie à certaines velléités de son nouveau propriétaire qui, en rachetant Twitter Inc. a annoncé vouloir en faire « une arène ouverte pour la liberté d’expression ».
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« L’oiseau est libéré », aura été, d’ailleurs, le premier tweet du nouveau propriétaire qui a été par la suite obligé d’indiquer que « l’engagement fort de Twitter en matière de modération du contenu reste absolument inchangé. », suite aux inquiétudes suscitées par les licenciements massifs quant à la modération du contenu, des ONG et des activistes défenseurs des droits. Ces derniers s’inquiètent, en effet, que ces changements pourraient se traduire par une augmentation du contenu indésirable nuisible ou de nature à amplifier la désinformation sur le réseau social. Il faut dire qu’en prenant le contrôle de Twitter, le milliardaire fondateur de SpaceX, Tesla et PayPal s’est posé comme le défenseur de la liberté d’expression, ce qu’il entend concrétiser avec un allégement des règles de modération.
L’Afrique et la censure
C’est justement sur cette question qu’Elon Musk et son réseau social risque de faire des vagues en Afrique où Twitter a eu déjà fort à faire avec certains gouvernements très à cheval sur le contrôle de la liberté d’expression électronique. On se rappelle qu’en 2021, par exemple, le gouvernement fédéral du Nigeria avait suspendu Twitter durant 07 mois pour avoir supprimer 2 tweets du président Muhammadu Buhari et pour sa proximité supposée avec des indépendantistes biafrais ou des activistes du mouvement #EndSARS. En voulant étendre la liberté d’expression sur Twitter et réduire la réglementation en matière de modération des contenus qu’il estime trop restrictive, le nouveau patron de Twitter Inc. risque de provoquer le courroux de certains gouvernements qui n’hésitent pas à censurer même l’internet en cas de troubles politiques. Avec la multiplication, ces dernières années des lois sur la lutte contre la cybercriminalité qui s’avèrent dans plusieurs pays du continent comme une voie ouverte au contrôle et à la censure de la liberté d’expression, comme le dénoncent plusieurs organisations de défense des droits humains, la volonté d’Elon Musk de faire de Twitter « une arène pour la liberté d’expression » risque de ne pas faire long feu. Paradoxalement, cela pourrait pousser la plateforme de servir de refuge à tous les mouvements ou activistes en désaccords avec les autorités de leurs pays, ce qui ne fera qu’accroitre l’influence du réseau. Mais pour quel bénéfice pour celui dont le véritable intérêt pour ce rachat du réseau social est de le rentabiliser davantage c’est à dire en tirer le maximum de profits ? C’est là tout l’enjeu pour celui qui a vu le jour à Pretoria en Afrique du Sud, il y a 51 ans, et qui connait très tout le potentiel à venir du continent en matière de technologie, lui qui a plusieurs pays du continent dans le viseur pour sa nouvelle offre de service internet à travers Starlink son autre société en quête d’opportunités sur le continent…