Face aux multiples crises et chocs récurrents dont elles sont confrontées, les économies africaines ont urgemment besoin de financements concessionnels pour renforcer leur résilience ont plaidé les experts à l’occasion de la journée de reflexion sur la stimulation de l’accès au Fonds de résilience et de durabilité du Fonds monétaire international (FMI), organisé le 28 mars dernier à Addis-Abeba, par AfriCatalyst et la Commission économique pour l’Afrique (CEA). Alors que les crises financière, sanitaires et climatiques menacent d’inverser deux décennies de progrès en matière de développement en Afrique, les experts ont appelé à des prêts concessionnels urgents afin d’aider le continent à renforcer sa résilience et à stimuler la croissance économique. Il s’agit notamment des instruments financiers mis en place par le FMI pour la durabilité et la résilience et dont seul le Rwanda est actuellement bénéficiaire.
Selon les experts, les multiples crises, y compris la crise alimentaire et celle de l’énergie issues de la guerre en Ukraine, les effets du changement climatique, les conflits et le resserrement des conditions financières mondiales, ont accru le déficit de financement du développement et la vulnérabilité de l’endettement de l’Afrique. Lors des échanges tenus au cours de la journée dont le thème a porté sur: « Stimuler l’accès au Fonds de résilience et de durabilité du Fonds monétaire international (FMI) », organisée par AfriCatalyst et la Commission économique pour l’Afrique (CEA), le Directeur de la Division de la macroéconomie et de la gouvernance de la CEA, Adam Elhiraika, a déclaré qu’au cours des six dernières décennies, « chaque récession que le monde a connue a entraîné une augmentation de la dette publique mondiale ». Ainsi, de nombreux pays africains ont ainsi vu augmenter leur dette publique et une grande partie de celle-ci a été contractée entre 2020 et 2021 alors qu’ils cherchaient à contrecarrer les effets de la pandémie du Covid-19. En conséquence, a-t-il fait remarquer, « de nombreux pays ont été aux prises avec un endettement et des frais d’intérêts élevés, ce qui a entravé la réduction de la pauvreté et a fait obstacle à leurs reprises économiques ».
« Malgré les efforts nationaux et internationaux, un nombre croissant de pays africains continuent de ployer sous le poids de la dette et du service de leur dette ; certains sont déjà surendettés ou frôlent le surendettement. Cela entrave le renforcement de la résilience aux crises futures, un renforcement essentiel pour le développement durable. », a indiqué Adam Elhiraika, Directeur de la Division de la macroéconomie et de la gouvernance de la CEA.
Faciliter l’accès aux instruments du FMI pour renforcer la durabilité et la résilience
Afin d’aider les Pays en développement et ceux à revenu intermédiaire de la tranche inférieure à renforcer leur résilience aux crises externes et à atteindre une croissance durable, le FMI a créé le Fonds fiduciaire pour la résilience et la durabilité (RST). Le Fonds offre un instrument de financement innovant visant à aider les pays à relever les défis structurels à long terme, tel que l’adaptation et l’atténuation du changement climatique et les pandémies : la Facilité pour la résilience et la durabilité (RSF). Afin d’aider les pays africains à accéder à ces fonds, AfriCatalyst, une Société de conseil en développement mondial basée en Afrique, a élaboré un guide pratique visant à informer les décideurs politiques et les parties prenantes nationales sur les principales caractéristiques, les critères d’éligibilité et les objectifs du RSF. Selon les initiateurs, le guide explore comment le FMI dans le cadre du RST pourrait soutenir la conception et la mise en œuvre de politiques macroéconomiques nationales pour intégrer les risques climatiques et pandémiques ainsi que le coût de leurs adaptations dans les cadres macro-fiscaux.
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Selon le Fondateur et PDG d’AfriCatalyst, Daouda Sembene, le RST présente des avantages potentiels pour les pays africains, touchés par un endettement élevé. AfriCatalyst, avec le soutien de la Fondation Bill & Melinda Gates, a renforcé la production de données probantes et le soutien consultatif technique aux décideurs africains afin de promouvoir l’accès des pays d’Afrique subsaharienne au financement du FMI dans le cadre du RST. M. Sembene a aussi relevé qu’il y a une forte demande de financement climatique, mais que les ressources disponibles sont limitées. En exemple le FMI cherche actuellement 40 milliards de dollars pour le RST là ou il n’a réussi à lever que 26 milliards de dollars. « Les pays africains ont besoin de ressources supplémentaires », a indiqué M. Sembene, qui a fait remarquer par la même occasion que le financement climatique cumulé de 52 pays africains dans le cadre des Contributions déterminées au niveau national est estimé à 2.300 milliards de dollars.
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Selon les explications de Fenohasina Rakotondrazaka Maret, Conseillère principale à AfriCatalyst, l’accès à ce financement du RST sera accordé en fonction de la solidité des réformes des nations et de la viabilité de leurs dettes. « Les prêts concessionnels ont une échéance de 20 ans et un différé d’amortissement de dix ans et demi. Les emprunteurs paieront ainsi un taux d’intérêt qui représente une marge modeste par rapport au taux de DTS de trois mois, où les pays les plus pauvres bénéficieront des conditions de financement les plus favorables », a expliqué l’experte.
Le Rwanda, seul pays à bénéficier encore du RSF du FMI
Le Rwanda est actuellement le seul pays africain à avoir un programme soutenu par le RSF et approuvé par le FMI. Il a reçu un financement de 319 millions de dollars américains pour ses programmes de lutte contre le changement climatique. Selon le Conseiller principal d’AfriCatalyst, Ali Mansoor, ancien Directeur adjoint du FMI, « le Rwanda a intégré les questions climatiques dans ses stratégies nationales de transformation ». Lors de la COP27, le Rwanda a , en effet, lancé son programme « Ireme Invest », destiné à financer des projets verts pour les Petites et moyennes entreprises (PME). Et d’ajouter que le Rwanda utilisera le RSF pour stimuler d’autres financements et organiser une meilleure planification dans le cadre de son processus budgétaire destiné aux risques liés au changement climatique, ainsi qu’ à accréditer son ministère de l’environnement dans le cadre du Fonds vert pour le climat et du Fonds d’adaptation.