Au moment où la Terre est à la croisée des chemins pour entamer une transition énergétique, à même de sortir d’une crise écologique globale, les investissements dans des technologies industrielles irrespectueuses de l’environnement sont de plus en plus bannis.
L’écocide ou géocide est un crime international, caractérisé par un endommagement grave de tout ou partie des communs planétaires et/ou d’un système écologique de la Terre. Des limites ont été atteintes, voire dépassées, parce que des écosystèmes ont été détruits, avec comme corollaire la destruction de fondements de notre civilisation, la menace des conditions de vie sur Terre, etc. Parmi ces limites, les observateurs mettent le doigt sur le changement climatique, le changement d’usage des sols, la perte de l’intégrité de la biosphère, ou encore la modification des cycles biochimiques (phosphore et azote). Selon la FAO, 420 millions d’hectares de forêt sont perdus depuis 1990. Des terres, affectées à d’autres utilisations nocives à l’environnement, singulièrement à une agriculture intensive.
Les décideurs sont de plus en plus conscients quand il s’agit d’opérer un investissement d’envergure. Le green, une énergie propre et une économie sobre en carbone, voire décarbonée, sont à l’ordre du jour. Les études d’impact environnemental sont devenues courantes et constituent un préalable. Il est vrai que les suivis laissent à désirer. Si dans certains projets, l’investisseur se plaît à informer sur la réhabilitation des sites déjà exploités, notamment à travers le remblaiement et la reforestation, allant jusqu’à baptiser plants d’oliviers, de grenadiers… du nom des bonnes volontés qui se prêtent au jeu, cependant dans d’autres, particulièrement dans le secteur minier, l’exploitant laisse derrière lui des excavations sur des terrains dévastés et pollués.
Un concept remis à la page
Le concept a évolué et est remis en selle. De la Conférence des Nations Unies à Stockholm, en 1972, lorsque le Premier ministre suédois, Olof Palmer, l’évoqua, fustigeant l’opération Ranch Hand de l’armée américaine au Vietnam (utilisation de défoliants), à la Déclaration de Rio à l’issue du Sommet de la Terre de 1992, la Cour Pénale internationale a commencé à avoir les coudées franches pour déterminer la gravité et imposer des mesures coercitives. Fort heureusement, les décideurs se penchent davantage sur cette problématique.
De 1990 à 2020, la superficie des zones forestières protégées s’est accrue. De 191 millions d’ha, elle est passée à 726 millions d’ha. Quant à celle faisant l’objet d’un plan de gestion, elle s’est beaucoup appréciée depuis 2000, passant de 233 millions d’ha à un peu plus de 2 milliards d’ha en 2020. Toutefois, cette tendance reste différenciée, selon les pays. Il arrive que des poumons verts ou des forêts classées soient spoliés avec des empiètements de projets agricoles ou immobiliers. Entre 2010 et 2020, des pays, tels que l’Angola, la Bolivie, le Brésil, le Cambodge, l’Indonésie, le Mozambique, le Myanmar, le Paraguay, la RDC, la Tanzanie, ont enregistré des pertes annuelles nettes moyennes de superficie forestière considérables. C’est tout le contraire en Australie, au Chili, en Chine, aux Etats Unis d’Amérique, en France, en Inde, en Italie, en Roumaine, en Turquie ou au Vietnam, où des gains annuels nets moyens ont été enregistrés, sur cette période. On s’accorde sur le fait qu’une transition juste et globale repose désormais sur de nouvelles règles de l’économie mondiale. Un cadre juridique contraignant est nécessaire pour mettre fin aux anciennes pratiques coloniales et destructrices et pour garantir que toutes les industries assument la responsabilité de leur impact sur les travailleurs, les communautés et les écosystèmes. Dans les pays en voie de développement qui envisagent des projets structurants, une loi sur l’écocide pourrait fournir ce garde-fou.