Chronique- Cryptomonnaies, Genius Act, avec ou contre les monnaies conventionnelles ?

Le volume des transactions cryptographiques a atteint 10,6 billions de dollars US, soit une hausse de 56 % depuis 2023. Le nombre des cryptoactifs se compte en milliers et le bitcoin pourrait atteindre 250 000 dollars US en 2025, effet « Trump Trade » aidant. Les interpénétrations entre les cryptomonnaies, en général, et en particulier un acte législatif tel que le Genius Act, avec les monnaies conventionnelles sont complexes. Il est clair qu’il s’agit d’une dynamique de coexistence, de concurrence, d’adaptation mutuelle, avec des relents de renforcement du dollar américain.

Les monnaies conventionnelles (ou fiduciaires) sont émises et régulées par des banques centrales et des gouvernements. Elles reposent, entre autres, sur la confiance dans l’autorité émettrice. Les cryptomonnaies, en revanche, sont décentralisées, basées sur la technologie blockchain, et fonctionnent sans intermédiaire bancaire.

Très récemment, les Etats Unis ont conclu le Genius Act, successif au Clarity Act. Ce texte réglementaire ne positionne pas les cryptomonnaies « contre » les monnaies conventionnelles, mais plutôt « avec » elles, en cherchant à les intégrer et à les réguler. Il s’agit d’une tentative des autorités d’instaurer un dispositif législatif pour les stablecoins (coins adossées à une devise classique), de s’adapter à l’émergence des actifs numériques, de tirer parti de leurs avantages (rapidité, transparence), tout en minimisant les risques (volatilité, criminalité financière).

Cryptos contre monnaies conventionnelles

En termes de décentralisation et d’indépendance, le fait, que les cryptomonnaies ne soient pas soumises au contrôle des gouvernements ou des banques centrales, séduit ceux qui se méfient des politiques monétaires traditionnelles. Ils évoquent alors l’inflation ou la dévaluation.

A lire aussi: Finance : Yellow Card obtient la première licence africaine de cryptomonnaie

Aussi, les transactions en cryptomonnaies peuvent être plus rapides et moins coûteuses, surtout pour les transferts internationaux, car elles éliminent les intermédiaires.

En outre, la transparence de la blockchain reste un argument de taille pour les défenseurs du crypto. Toutes les transactions sont enregistrées sur un registre public, la blockchain, offrant une transparence et une traçabilité accrues. Cette technologie sous-jacente ouvre la voie à de nouvelles applications et services financiers.

Dans nos pays, où le taux de bancarisation reste encore faible, ce type de monnaies favorise l’inclusion financière. En effet, les cryptomonnaies peuvent offrir des services financiers à des populations non bancarisées.

En phase avec les monnaies conventionnelles

Face aux sceptiques quant à la vulgarisation du crypto, un grand nombre d’économistes plaident une certaine coexistence entre les deux types de monnaies. Lorsqu’on considère la stabilité, il est admis que les monnaies conventionnelles sont généralement plus stables et moins volatiles que la plupart des cryptomonnaies, ce qui les rend plus fiables pour les transactions quotidiennes et la réserve de valeur.

Concernant la réglementation, le fait que les monnaies fiduciaires aient cours légal et soient encadrées, par des cadres réglementaires établis, offre une meilleure protection aux consommateurs et une plus grande sécurité juridique.

De plus, ces monnaies vont de pair, dans la mesure ou les banques centrales utilisent les monnaies fiduciaires pour mener des politiques monétaires (taux d’intérêt, contrôle de l’inflation) qui impactent l’économie réelle. A noter que les monnaies conventionnelles bénéficient d’une liquidité bien plus importante et d’une acceptation généralisée.

Genius Act, une passerelle entre deux mondes ?

Le Genius Act est une législation américaine récente qui vise à réguler les stablecoins, adossées au dollar américain. Son objectif n’est pas de s’opposer frontalement aux monnaies conventionnelles. Plutôt ce dispositif entend intégrer les cryptomonnaies au système financier existant. En encadrant les stablecoins, le Genius Act leur donne un statut légal, les rendant plus sûrs et plus attractifs pour les institutions financières traditionnelles.

Il ne faut surtout pas perdre de vue que ce texte de loi cherche à réaffirmer le rôle du dollar, en tant que monnaie de réserve mondiale, en le « réinventant », grâce à la blockchain. Les stablecoins, adossées au dollar, sont vues comme un moyen d’augmenter la demande pour la monnaie américaine et ses Bons du Trésor. Les adeptes de la cryptomonnaie n’ont qu’à benchmarker le modèle pour soutenir leur monnaie classique.  

Derrière le Genius Act qui impose des exigences de transparence et de contrôle des réserves aux émetteurs de stablecoins, ainsi que des mesures contre le blanchiment d’argent et la fraude, on peut apercevoir un souci de protection des consommateurs et de prévention de risques.

Par ailleurs, dans le sens de favoriser l’innovation encadrée, le texte vise à permettre l’innovation dans l’espace crypto, tout en assurant la stabilité financière et la sécurité.

Vers une hybridation

Le nombre de détenteurs de cryptomonnaies dans le monde, sans cesse croissant, a atteint 562 millions en 2024, soit un peu moins de 7 % de la population mondiale. Le futur verra probablement une hybridation des systèmes financiers, où les monnaies numériques de banque centrale (MNBC) coexisteront avec des stablecoins régulés et d’autres cryptomonnaies, redéfinissant ainsi les rôles des acteurs traditionnels (banques) et des nouveaux venus du monde de la blockchain.

A l’instant où nous chargeons ce papier, 1 bitcoin vaut 118 276,70 USD, soit 65 670 633,75 f CFA, contre à peine 0,01 $ en 2009 au moment de son lancement, par Satoshi Nakamoto !!!