L’Agence spatiale africaine (AfSA) a pour objectif de mutualiser les efforts et les ressources des pays africains, afin de tirer parti des technologies spatiales pour leur développement socio-économique. De prime abord, il présenterait de nombreux atouts pour les Etats membres. Qu’en est-il réellement ?
Le spatial connaît des mutations importantes. Au-delà de télécommunications et de connetivité plus aisées, d’aucuns parlent de désoxygénation de la terre, de présence humaine durable sur la Lune, de missions habitées sur Mars… A la veille de la NewSpace Africa Center Conference, tenue du 21 au 24 avril 2025 au Caire, l’Agence spatiale africaine (AfSA) a été inaugurée, le 20 avril dans la capitale égyptienne. Evénement majeur, moment historique dans la coopération spatiale internationale pour le développement et la connectivité du continent africain, l’opérationnalité de cette structure, mise en route par la Commission de l’Union africaine (UA), a-t-il des chances de produire les résultats escomptés ?
En Afrique, de plus en plus de pays disposent de leurs propres satellites. L’Egypte, qui abrite le siège de l’AfSA, en est l’un des pionniers. Les domaines des communications et de la navigation par satellites, de l’observation de la terre et des sciences spatiales, sans omettre l’éducation et la formation, pourront être auscultés par cette nouvelle structure. L’indépendance de la structure reste une condition sine qua non. Compte tenu des moyens financiers assez limités du continent, inversement proportionnels à ses potentialités, des offres de collaborations ne manqueront pas. Elles seront bienvenues, à condition qu’elles n’imposent pas de postes d’experts techniques venus d’ailleurs au sein de l’Agence. Il revient au contient de former et s’outiller d’une masse critique d’experts dans le domaine…
Sur son site, https://africanspaceagency.org/, il ressort que « l’AfSA sera le principal point de contact pour la coopération de l’Afrique avec l’Europe et d’autres partenaires internationaux. L’un de ses principaux objectifs, tel que défini dans la loi sur l’Agence spatiale africaine, est de renforcer les missions spatiales en Afrique, en garantissant un accès optimal aux données, informations, services et produits spatiaux. Une fois pleinement intégrée aux programmes nationaux, régionaux et continentaux, l’AfSA jouera un rôle crucial dans l’élimination des doublons et des inefficacités au sein de l’écosystème spatial africain. En tant qu’organisme officiel de supervision et de coordination de ces efforts, elle sera également chargée de la mise en œuvre effective de la politique et de la stratégie spatiales africaines et de la réalisation des objectifs spatiaux du continent. »
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Gageons que le Président d’AfSA, Dr Tidiane Ouattara, titulaire d’un doctorat et d’une maîtrise en télédétection et systèmes d’information géographique (SIG) de l’Université de Sherbrooke (Canada), respectivement en 2001 et 1996, et son équipe vont rapidement surfer sur le filon spatial. Il est vrai que depuis l’inauguration, pas grand-chose dans l’agenda, excepté une visite au Centre de contrôle et de collecte des données spatiales SENSAT à Diamniadio, au Sénégal. Ce fut l’occasion d’échanger avec le Professeur Gayane Faye, Coordinateur du Centre, et son équipe. Pour rappel, ce pays joue un rôle croissant dans le secteur spatial africain.
Des atouts majeurs, mais quels moyens ?
Une agence, qui permettrait aux pays africains d’accéder à des outils pour une prise de décision efficace dans la gestion des ressources naturelles (agriculture, eau, environnement) grâce aux données d’observation de la Terre fournies par satellite, doit disposer de moyens. Cet aspect est d’autant plus important qu’il aiderait à améliorer la sécurité alimentaire, à surveiller le changement climatique et à atténuer les risques liés aux catastrophes naturelles.
Le difficile arbitrage sera de préserver sa souveraineté technologique et indépendance contre des offres conditionnées venues d’ailleurs. En développant ses propres capacités spatiales, l’Afrique réduit sa dépendance vis-à-vis des acteurs internationaux. Rappelons que l’AfSA entend coordonner les activités spatiales, harmoniser les infrastructures et soutenir la création d’une industrie spatiale africaine capable de transformer l’innovation en produits et services.
Relativement à la communication et la connectivité, la sécurité et la défense, la réduction des coûts, les technologies spatiales, que facilitent cette agence, se passent de tout commentaire. Elle favorisera la couverture télévisée instantanée, les services de navigation et, surtout, l’accès à une connexion à large bande pour les communautés rurales et éloignées, la télémédecine et l’éducation à distance, mais aussi assurerait la sécurité intérieure (surveillance des frontières, lutte contre la criminalité) et extérieure (observation des zones de conflit), ainsi que pour la gestion des catastrophes civiles.
En coordonnant les politiques nationales et en mutualisant les ressources, l’agence évitera la duplication des efforts et des investissements, rendant les technologies spatiales plus accessibles à tous les États membres.