Avec plus de 600 000 foyers sans électricité, l’Afrique, dont le taux de pollution à l’échelle mondiale ne dépasse pas 1%, peut-elle se permettre l’économie d’user de ses ressources naturelles fussent-elles fossiles ?
L’Afrique reste encore sous-industrialisée. Les taux d’accès aux utilités (Eau courante, électricité, assainissement, téléphonie, fibre optique, internet…) y restent très faibles, voire nuls dans certaines contrées. Elles sont rares les villes africaines enveloppées dans un smog aussi dense que celui vécu à Jakarta, Pékin, Ryad, Doha ou Lahore. Il est vrai que le laxisme sur les carburants à taux importants d’émissions de particules fines doit être combattu à fond dans certaines régions africaines. Si certaines se sont conformées au Super sans plomb et au gasoil 50 PPM, voire sont en train d’adopter la norme Euro 6b (Super sans plomb et gasoil 10 PPM), d’autres se dirigent vers des taux de pollution bien plus critiques, si rien n’est fait, face à la progression du parc automobile, corrélée aux tensions démographiques.
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Parallèlement d’autres menaces, telles que l’insécurité alimentaire, dues à une perte de la biodiversité, au changement climatique, à la crise de l’eau, à la déforestation… existent et se font pressantes. La Banque mondiale estime que 630 millions de personnes connaîtront la faim d’ici 2030. L’approche multidimensionnelle, en cours d’expérimentation en Égypte, à Madagascar et en RCA (République centrafricaine), est significative à plus d’un titre et présuppose une part importante de ces affamés sur le continent noir. Nous vivons dans un monde où 1/3 des Etats ne reconnaissent toujours pas le droit à l’eau et à l’assainissement dans leur constitution (Rapport UN- Glass Water).
Une exploitation plus respectueuse de l’environnement
Pour inverser la tendance, notre continent, où de nouveaux champs pétroliers, de gaz naturel et d’uranium sont découverts, doit-il faire la fine bouche et les exploiter à minima, à défaut d’y renoncer ? Si les impacts écologiques de l’exploitation du gaz naturel et de l’uranium peuvent être beaucoup moindres, celle du pétrole a fait jusqu’à présent de gros dégâts, en termes de réchauffement climatique dû à l’émission de gaz à effet de serre. L’opportunité, qui se présente aux nouveaux pays, riches en hydrocarbures, est d’adopter une exploitation plus respectueuse de l’environnement. Les conflits à la frontière russo-ukrainienne et dans le Sahel ont induit des tensions inflationnistes quasi-internationales. La crise a même exacerbé le retour d’Etats européens à des sources d’énergie fossile, telles que le charbon et le lignite… L’Afrique peut bénéficier d’expériences accumulées ailleurs et éviter les erreurs des pionniers. Il n’est pas question de tourner le dos à la manne pétrolière. Ces ressources seront un excellent tremplin pour pérenniser dans le court et moyen terme des investissements structurants, approvisionner à fortes doses les centrales électriques à même de reléguer aux oubliettes des délestages récurrents qui font perdre de points de croissance, etc.
L’Afrique, usine du monde du futur
Il s’agira d’aller au-delà d’un seuil d’électrification des ménages et des entreprises, mais de rendre son accès universel, pour une industrialisation tous azimuts. C’est seulement à ce moment-là que l’Afrique, qui regorge de matières premières, pourrait réussir le défi de la transformation qui va procurer aux exploitants plus de valeur ajoutée. Concomitamment, d’autres sources d’énergie dites vertes, peuvent être versées dans le panier du mix-énergétique. Mieux encore, une fois que le secteur secondaire atteindra sa vitesse de croisière, boostée par l’exploitation saine d’énergies fossiles, une industrie X.0, qui a pour fondement la mécanique quantique, pourrait prendre le relais. Les travaux réalisés dans le réseau des AIMS (Institut Panafricain des Sciences Mathématiques) lors des Next Einstein Forums, peuvent constituer ce socle, pour peu que l’adéquation Formation-Emploi rapproche universités et instituts de formation des entreprises (Startups, PME-PMI et Grands Comptes). C’est à cette condition et à celle-là seulement que l’Afrique deviendrait l’usine du monde du futur.