RDC: accord avec le FMI pour un décaissement supplémentaire de 200 millions de dollars

Après la conclusion, en décembre dernier, d'un accord au titre de la troisième revue de l’accord de Facilité élargie de crédit (FEC) en faveur de la République démocratique du Congo (RDC) qui a permis un décaissement de 203 millions de dollars US pour répondre aux besoins de la balance de paiement du pays, les deux parties viennent de rééditer l'expérience. La directrice générale Kristalina Georgieva rencontre le président de la RDC Félix Tshisekedi au FMI à Washington, le 2 mars 2020. Crédit : Joshua Roberts /IMF-FMI.

Après plus de deux semaines de négociations, le FMI et le gouvernement de la RDC sont parvenus à un accord au niveau des services pour la quatrième revue de l’accord triennal au titre de la Facilité élargie de crédit (FEC) avec à la clé, un nouveau décaissement de 200 millions de dollars dès l’approbation de l’accord par le Conseil d’administration du Fonds lors de sa réunion de juin prochain. Selon la mission de l’institution de Breton Wood, malgré l’apparition des déséquilibres macroéconomiques qui alimentent les pressions inflationnistes ainsi que le conflit à l’Est du pays et les élections prévues en fin d’année qui amplifient les inquiétudes, l’économie congolaise a fait preuve de résilience avec une croissance du PIB réel de 8,9% en 2022 et anticipée à 6,8% en 2023. Pour le FMI, afin d’assurer la stabilité macroéconomique dans le contexte de la persistance du conflit armé à l’Est et des risques externes et domestiques grandissants, les autorités doivent mettre en œuvre un plan d’assainissement budgétaire crédible et une politique monétaire plus restrictive, tout en poursuivant leurs réformes structurelles de la gestion des finances publiques, du secteur monétaire et financier, ainsi que de la gouvernance et de la lutte contre la corruption. En ligne de mire, l’accès pour la RDC à d’autres ressources du Fonds comme la Facilité de résilience et de viabilité pour laquelle les eux parties ont déjà engagés des négociations.

La lune de miel entre le gouvernement de le RDC et le FMI se poursuit de plus belle! Après la conclusion, en décembre dernier, d’un accord au titre de la troisième revue de l’accord de Facilité élargie de crédit (FEC) en faveur de la République démocratique du Congo (RDC) qui a permis un décaissement de 203 millions de dollars US pour répondre aux besoins de la balance de paiement du pays, les deux parties viennent de rééditer l’expérience. Et ce, à l’issue de la mission qu’a mené, du 19 avril au 3 mai 2023 à Kinshasa, une équipe du FMI dans le dans le cadre de la quatrième revue de l’accord triennal au titre de la FEC. « Les autorités de la République démocratique du Congo et l’équipe du FMI sont parvenues à un accord au niveau des services sur les politiques économiques et financières nécessaires à la conclusion de la quatrième revue au titre de l’accord soutenu par la FEC, sous réserve de l’approbation de la direction générale du FMI. L’examen par le Conseil d’administration du FMI est prévu pour fin juin 2023. L’achèvement de la revue rendra disponible 152,3 millions de DTS pour le soutien à la balance des paiements », a annoncé le FMI dans un communiqué publié à l’issue de la mission. Durant son séjour, la mission a eu des entretiens laborieux avec le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge, le vice-Premier ministre et ministre de l’Économie Nationale Vital Kamerhe, le Vice-Premier ministre et ministre de la Défense Jean-Pierre Bemba, le vice-Premier ministre et ministre de la Fonction publique Jean-Pierre Lihau, le ministre d’État et du Budget Aimé Boji, le ministre des Finances Nicolas Kazadi, la ministre des Mines Antoinette N’Samba Kalambayi, la gouverneure de la BCC Malangu Kabedi Mbuyi, d’autres hauts fonctionnaires, des partenaires au développement et des représentants du secteur privé et d’organisations de la société civile.

« Nous sommes restés ici pendant deux semaines pour des discussions sur le programme FEC. On a communiqué à Monsieur le Premier Ministre sur un accord au niveau des services du FMI qui permet de nous avancer à la préparation au Conseil d’Administration à la fin du mois de juin. Nous avons discuté de la situation macroéconomique avec une croissance résiliente au niveau de la RDC et de l’appui pour le développement du secteur minier. Au même moment, nous avons discuté de l’accélération de l’inflation dans un contexte difficile avec les conflits de l’Est et l’organisation des élections. », a déclaré à la presse Madame Mercedes Vera Martin, cheffe de la mission du FMI en RDC lors de la conférence de presse qu’elle animé mercredi dernier à l’issue de sa rencontre avec le Premier ministre Jean-Michel Sama Lukonde Kyenge à qui elle a fait le compte rendu du résultat des négociations.

il a ajouté qu’il a été question de la politique monétaire et budgétaire pour diminuer les pressions inflationnistes, accélérer la mise en œuvre des réformes institutionnelles, ainsi que des efforts des autorités pour avancer sur la diversification économique. La proposition, par rapport au montant, c’est de 200 millions de dollars qui seront mis à la disposition de la République Démocratique du Congo, après décision du Conseil d’Administration prévue à la fin du mois de juin au FMI a-t-il précisé.

Une économie résiliente malgré des risques macroéconomiques

Selon le FMI, si l’économie fait preuve de résilience, des déséquilibres macroéconomiques sont apparus. La croissance du PIB réel est estimée à 8,9 % en 2022, en raison d’une production minière plus importante que prévu, et devrait atteindre 6,8 % en 2023, toujours grâce au secteur extractif. Aussi, les recettes fiscales plus élevées que prévu en 2022, y compris des recettes exceptionnelles du secteur extractif, ont permis d’augmenter les dépenses courantes, principalement des dépenses exceptionnelles liées à la sécurité et le remboursement d’arriérés. Le déficit budgétaire intérieur s’est de son coté creusé en 2022 pour atteindre 1,3 % du PIB et l’accélération des dépenses à la fin de 2022 a généré un excès de liquidités et contribué à des pressions inflationnistes et sur le taux de change. Au 22 avril 2023, note le FMI dans le communiqué de fin de mission publié le 3 mai,  le taux de change parallèle du franc congolais s’était déprécié de 13 % en glissement annuel par rapport au dollar américain et l’inflation avait accéléré pour atteindre 17 %. Selon le constat fait la mission, la forte croissance des importations a affaibli la position extérieure en 2022, avec un déficit du compte courant estimé à 5,7 % du PIB. Toutefois, indique la même source, d’importants flux financiers entrants ont permis à la Banque centrale du Congo (BCC) d’accumuler des réserves internationales, dont le niveau brut équivalait à environ deux mois d’importations à la fin de 2022.

«Les perspectives à moyen terme restent favorables, soutenues par l’augmentation de la production minière et dépendent d’efforts de réforme proactifs. Dans un contexte d’incertitude élevée avec le conflit armé en cours à l’Est, les élections à venir et les risques externes en lien avec l’affaiblissement des perspectives économiques mondiales, la volatilité des prix des produits de base et la guerre prolongée en Ukraine, des politiques économiques prudentes sont justifiées pour le reste de l’année 2023», a estimé Mercedes Vera Martin.

Selon le FMI,  la politique budgétaire devrait permettre de répondre avec prudence aux besoins de dépenses supplémentaires en matière de sécurité, d’aide humanitaire et de préparation des élections dans le contexte de la détérioration de la situation à l’Est, tandis que les recettes en 2023 sont projetées au même niveau que lors de la troisième revue du programme. Aussi, a indiqué le Fonds, les recettes additionnelles non anticipées, si elles se matérialisent, contribueront à constituer des réserves budgétaires.  «La hiérarchisation des dépenses, la révision à la baisse des dépenses en biens et services et le maintien de la masse salariale au niveau prévu dans le budget permettront de soutenir les dépenses d’investissement tout en réduisant les pressions inflationnistes», a aussi estimé le Fonds.

La feuille de route du FMI pour l’accès à d’autres mécanismes de financement

Suite à cette dernière évaluation de l’économie de la RDC que son équipe a réalisée au cours de sa mission, le FMI a estimé que le renforcement de la discipline budgétaire et de la gouvernance financière ainsi que l’amélioration du climat des affaires constituent les principaux ingrédients pour que le pays puisse accéder à d’autres ressources supplémentaires mises en place pour venir en aide à des catégories de pays dans le besoin.  Selon le Fonds, la mobilisation des recettes et les réformes de la gestion des finances publiques renforceront la politique budgétaire et les efforts visant à améliorer l’administration fiscale et à rationaliser les taxes parafiscales sont importants pour faciliter la mobilisation des recettes. Plus généralement, poursuit la même source, la mise en place du compte unique du Trésor, le renforcement du système de passation des marchés publics et l’amélioration de la gestion des investissements publics et des rapports d’exécution budgétaire contribueront à améliorer l’exécution du budget, à renforcer la gouvernance budgétaire et à améliorer l’efficacité des dépenses.

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Aussi,  recommande le FMI, la BCC pourrait resserrer la politique monétaire pour contenir les pressions inflationnistes, tout en continuant à constituer des réserves pour résister aux chocs extérieurs. En ce sens, le maintien du rôle du taux de change en tant qu’amortisseur de chocs reste essentiel pour préserver les réserves alors que les réformes visant à renforcer le cadre de la politique monétaire et la gouvernance de la banque centrale seront essentielles pour améliorer la gestion de la liquidité et l’efficacité de la transmission de la politique monétaire. «Des réformes ambitieuses sont également nécessaires pour renforcer la résilience du secteur bancaire et promouvoir l’inclusion financière, en commençant par la mise en œuvre de la nouvelle loi bancaire approuvée en décembre 2022», a aussi plaidé le FMI pour qui les autorités congolaises doivent également poursuivre les efforts pour améliorer le climat des affaires et renforcer le cadre législatif et réglementaire pour renforcer la lutte contre le blanchiment des capitaux.  «L’amélioration du climat des affaires reste essentielle pour la diversification de l’économie et pour une croissance tirée par le secteur privé et repose sur des efforts continus pour mettre en œuvre le cadre de lutte contre la corruption, rationaliser le système fiscal, améliorer la transparence dans le secteur minier et publier des informations sur la propriété effective des bénéficiaires des marchés publics », a indiqué en ce sens le Fonds pour qui également, «des réformes majeures sont nécessaires pour rendre opérationnelle la loi sur la lutte contre le blanchiment des capitaux et le financement du terrorisme adoptée en décembre 2022, et pour sortir de la liste grise du Groupe d’action financière (GAFI) ».

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Selon le FMI, au cours de son séjour dans la capitale congolaise, la mission a également tenu des discussions sur les plans de réformes liées au climat afin de soutenir la demande des autorités d’accéder à la Facilité de résilience et de viabilité (RST) du FMI. Les mesures de réforme sont destinées à renforcer la résilience face aux risques liés au climat et à atteindre la contribution déterminée au niveau national, à favoriser les investissements verts et résilients, à renforcer la gouvernance dans le secteur forestier et à mettre en œuvre la réforme des subventions aux carburants a annoncé l’institution financière internationale qui a ajouté que ces réformes ont également bénéficié de consultations avec la Banque mondiale, la Banque africaine de développement, l’Initiative pour la forêt d’Afrique centrale et d’autres partenaires. «Sur la base de ces discussions constructives, les équipes du FMI et les autorités continueront de travailler dans les semaines à venir», a annoncé Mercedes Vera Martin, ce qui laisse entrevoir une porte ouverte pour la RDC qui pourrait, à condition de mener les réformes nécessaires estimées par le FMI, bénéficier de ce mécanisme auquel plusieurs pays du continent comme le Kenya sollicitent désespérément et que seul le Rwanda a pu jusque-là en bénéficier.

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