Chronique : Sahel- Rififi dans l’armement et poudrière incontrôlée

De lances missiles Stinger aux drones, en passant par des chars à chenilles, sans omettre l’aviation, les artilleurs et fusiliers de l’air africains s’équipent davantage d’équipements modernes. (Tchad défilé du 11 août 2018).

Pour lutter contre l’instabilité et l’insécurité, de nombreux pays africains sont devenus un marché juteux pour les marchands d’armes. Au Sahel, région semi-aride qui s’étend de l’océan Atlantique à l’est de l’Afrique, couvrant une partie de 12 pays, notamment le Mali, le Niger, le Tchad et le Burkina Faso, en proie à des conflits armés, depuis des décennies, face à des groupes terroristes, la prolifération d’armes légères et de petits calibres, mais aussi modernes reste préoccupante. Le marché des armes en Afrique en 2022 aurait atteint 20 milliards de dollars en 2022.

Si au cours des années 1980 et 1990, avec la série de conflits armés qui avaient éclaté dans la région du Sahel, la plupart des armes, qui circulaient dans le Sahel étaient légères et de petits calibres, y compris des fusils d’assaut, des pistolets et des mitrailleuses pour lutter contre des groupes criminels et terroristes, tels qu’Aqmi (Al-Qaïda au Maghreb islamique), Ansar Dine, Al Mourabitoun, le GICL (Groupe islamique combattant libyen), … depuis l’avènement d’Al Qaïda, de Boko Haram, puis l’éclatement de la Libye, les arsenaux se sont modernisés. De lances missiles Stinger aux drones, en passant par des chars à chenilles, sans omettre l’aviation, les artilleurs et fusiliers de l’air africains s’équipent davantage d’équipements modernes. Le peloton de tête, avec des pays comme l’Afrique du Sud, le Nigéria, l’Egypte, l’Algérie, le Maroc, le Tchad, l’Ethiopie, ou le Kenya dépensent en milliards de dollars pour la dissuasion, s’activent même dans le nucléaire « civile » et exhibent quelques fois des « biceps ». En Afrique du Sud, depuis la fin de l’Apartheid, il est question de réhabiliter l’arme nucléaire…

Poudrière au Sahel

Dans la région du Sahel, la prolifération d’armes légères a été alimentée par le commerce illicite des armes. Elle implique souvent des trafiquants et des réseaux criminels transfrontaliers. Les armes sont souvent introduites illégalement dans la région, à partir de pays voisins, notamment la Libye, où des armes sont facilement disponibles, depuis la chute de Kadhafi en 2011. La prolifération d’armes légères et de petits calibres dans le Sahel a entraîné de nombreux défis pour les gouvernements et les forces de sécurité de la région. Les groupes terroristes et criminels utilisent ces armes pour commettre des actes de violence, tels que des vols à main armée et des enlèvements.

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La coopération régionale et internationale, avec des instances, comme le G5 Sahel, entre en lice pour résoudre ce problème, renforcer les capacités de contrôle des armes, lutter contre le commerce illicite des armes et soutenir les efforts de développement économique et social pour réduire les causes profondes des conflits dans la région. Néanmoins, avec les récents développements et une géopolitique en mutation, certains pays ont exprimé leur volonté de moderniser leurs armements. Les ventes d’armes sont souvent opaques et difficiles à quantifier avec exactitude. A titre d’exemple, au Sénégal, des acquisitions d’armes et équipements légers, à hauteur de 45,3 milliards de FCFA, soit environ 73 millions d’euros, ont défrayé la chronique ces derniers mois. Une transaction, passée par le ministère en charge de la protection de l’Environnement, au nez et à la barbe du département de la Défense, et qui a soulevé un tollé…

Arsenaux modernes au Mali et Burkina Faso

Les arsenaux modernes au Mali et au Burkina Faso font référence à la présence croissante d’armes et d’équipements militaires plus avancés dans ces pays, dans le contexte de la lutte contre l’insécurité et le terrorisme au Sahel. L’objectif avoué de ces pays est d’assurer la stabilité, avoir le contrôle de leurs ressources et des frontières. Au-delà de Wagner, la Russie est de plus en plus sollicitée, mais aussi les Etats-Unis, tandis que la Chine et Israël, le sont dans une moindre mesure, au détriment de la France. Difficile d’avoir les chiffres exacts, tant une certaine omerta règne dans les quantités réelles. Il est malheureux de constater que la hausse de l’armement au Sahel a des conséquences négatives, notamment en termes d’augmentation de la violence, de menace pour la stabilité régionale, etc. En effet, la disponibilité d’armes plus sophistiquées a renforcé la capacité des groupes armés- qui en profitent aussi s’armant à moindre coût – à mener des attaques violentes, causant des pertes en vies humaines et des déplacements massifs de populations. Aussi, l’augmentation de l’armement crée une course entre les pays de la région, ce qui peut conduire à une escalade des tensions régionales et mettre en danger la cohésion et la stabilité régionales. Quant aux gouvernements des pays africains concernés, pour se défendre contre les menaces terroristes et sécuriser leurs frontières, l’acquisition et l’entretien d’arsenaux modernes représentent une charge financière importante. Ils sont alors tenus de dépenser des sommes importantes.

Pour remédier à la prolifération des armes au Sahel

Pour mettre un terme à cette escalade, les États gagneraient à renforcer les contrôles aux frontières pour dissuader les trafiquants d’armes et arrêter la contrebande transfrontalière, encourager la coopération régionale, en travaillant ensemble pour échanger des informations sur les mouvements d’armes et les réseaux de trafiquants d’armes, mais aussi lutter contre la corruption dans les appareils de sécurité et les douanes.  Pour lutter contre le trafic illicite d’armes, il est important de prendre des mesures pour combattre la corruption. En élaborant une réglementation plus stricte de la vente d’armes et en appliquant des lois plus strictes pour réglementer la vente d’armes et empêcher la vente illégale, les pays concernés peuvent atténuer le phénomène. Il faudra aussi, à un moment ou un autre, renforcer les mécanismes de désarmement, de démobilisation et de réintégration (DDR) des groupes armés consentants.

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La feuille de route la plus importante a trait à l’investissement dans le développement économique et social dans les zones touchées par la prolifération des armes. Il va sans dire que la pauvreté et le manque d’opportunités économiques peuvent conduire à la participation à des groupes armés. Enfin, en s’attelant à éduquer les populations au danger des armes, en les sensibilisant sur les impacts de la prolifération des armes, et les autres formes de violence, la stabilité et la paix pourront perdurer.

Article publié le 9 avril 2023 21 h 27 UTC+0

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