Perspectives économiques 2023 : le Sénégal et le Niger vers une forte croissance tirée par les hydrocarbures

Avec respectivement 8,1% et 7,3% de croissance du PIB projetés en 2023, le Sénégal et le Niger sont sur le podium des champions africains de la croissance. Toutefois, elle reste largement tributaire de l'exploitation des hydrocarbures comme ici au Niger sur le chantier de construction du plus gros oléoduc d'Afrique (2.000kms) qui va permettre au pays de porter sa production de pétrole brut de 20.000 actuellement à 110.000 à partir de juillet 2023 dans un contexte d'envolée des prix sur les marchés internationaux.

Dans une économie mondiale aux perspectives des plus incertaines et qui marque le pas, l’Afrique subsaharienne semble tirer son épingle du jeu malgré le relatif ralentissement auxquels s’attend le FMI et la Banque mondiale dans leurs dernière projections publiées la semaine dernière. Certains pays, notamment en Afrique, bravent même la crise comme en témoignent les prévisions de croissance du PIB pour 2023 à l’image du Sénégal et du Niger. Les deux pays font figure de nouveaux champions africains de croissance pour 2023. Toutefois, cette croissance est à bien des égards conjoncturels puisqu’elle sera largement tributaire de l’exploitation des ressources naturelles notamment des hydrocarbures.

Avec respectivement 8,1% et 7,3% de croissance du PIB en 2023 projetés pour 2023, le Sénégal et le Niger font figure de pays qui bravent la crise alimentaire et énergétique. Laquelle se traduira par un net ralentissement de l’activité économique mondiale comme le prévoit le FMI dans la dernière édition de ses perspectives économiques mondiales (PEM).  Les dernières de l’année, publiées en ce mois d’octobre. Selon les estimations pour l’Afrique subsaharienne, l’activité économique devrait fortement ralentir en 2022 et rester relativement modérée en 2023 en raison notamment du ralentissement dans les pays avancés et les pays émergents, le resserrement des conditions financières et la volatilité des prix des produits de base. Des chocs qui ont mis à mal les progrès réalisés l’an dernier et qui font dire à l’institution de Breton Woods, que « les perspectives demeurent très incertaines pour les pays de la région qui se retrouvent donc sur la corde raide ».

« En fin d’année dernière, l’Afrique subsaharienne semblait emprunter la voie d’une reprise vigoureuse, au sortir d’une longue pandémie. Malheureusement, cette amélioration a été brutalement interrompue par les bouleversements sur les marchés internationaux, ce qui exerce de nouvelles pressions sur les dirigeants de la région », a ainsi souligné Abebe Aemro Selassie, directeur du département Afrique du FMI.

Ainsi et d’après les mêmes estimations, la croissance de la région devrait ralentir de 4,7 % en 2021 à 3,6 % en 2022, en raison de l’atonie des investissements et d’une détérioration générale de sa balance commerciale. Selon le FMI, les pays pauvres en ressources naturelles, dont la structure économique est plus diversifiée, continueront à figurer parmi les pays les plus dynamiques et les plus résilients de la région, avec une croissance de 4,6 % en 2022, contre 3,3 % pour les pays exportateurs de pétrole et 3,1 % pour les pays riches en autres ressources naturelles.

Une croissance dynamique portée par l’exploitation des hydrocarbures

En 2023, le rythme de croissance attendue pour l’Afrique subsaharienne est de 4% soit mieux que les 3,8% attendus cette année et plus que la moyenne mondiale. Certains pays de la région, notamment en Afrique de l’Ouest, semblent même braver le pessimisme ambiant avec des rythmes de croissance très dynamiques. C’est le cas des pays de la zone UEMOA qui concentre à elle-seule, cinq (05) des sept (07) pays champions d’Afrique de la croissance en 2023, c’est à dire dont la croissance du PIB est attendue à plus de 7%. Avec 8,1%, le Sénégal sera même champion d’Afrique de la croissance l’année prochaine, suivi par le Niger avec des prévisions de 7,3% la même année.

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Ce bond spectaculaire du rythme de croissance attendu particulièrement dans ces deux pays restent toutefois à relativiser. Il est, en effet, porté par l’exploitation des ressources naturelles notamment les hydrocarbures. Au Sénégal, par exemple, le dynamisme de la croissance s’appui sur la mise sur le marché des premiers cubes de gaz naturel produis par le champ gazier de Grande Tortue Ahmeyim (GAT) au troisième trimestre 2023 ainsi que sur la poursuite des investissements pour l’exploitation de l’or noir du gisement de Sangomar. C’est le cas également au Niger où la croissance devrait bondir cette année à 7,3% projeté par le FMI en 2023. C’est loin de l’optimisme dont fait preuve le gouvernement qui s’attend à une croissance à deux chiffres soit 16,4%. Comme l’a soutenu le ministre des Finances, le Dr Ahmed Jidoud, lors de sa présentation à l’Assemblée nationale du projet de budget pour le prochain exercice 2023, en début du mois en cours. Dans ce pays sahélien pourtant confrontée à une double crise alimentaire et sécuritaire, la croissance sera portée par la mise en service, la même année, du pipeline qui va relier le champ pétrolier d’Agadem au Niger au port de Sèmè au Bénin, sur une distance de 2.000 kms et pour un investissement d’environs 4 milliards de dollars. Ce qui permettra au pays de porter sa production de pétrole de 20.000 barils de brut actuellement à 110.000 barils dont 90.000 barils seront destinés à l’exportation à partir de juillet 2023.

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Dans une moindre mesure, la croissance des autres pays producteurs et exportateurs de pétrole de la sous-région suit la même dynamique. C’est le cas de la Côte d’ivoire avec 6,5 % attendu en 2023 contre 5,5 % en 2022. Même si dans ce pays, l’activité économique sera également soutenue par les retombées de la diversification en cours avec une contribution assez estimable à la croissance des secteurs comme l’agriculture, l’industrie, le commerce, les transports ainsi que le BTP et les infrastructures. De manière générale, les pays de la sous-région qui s’en sortent le mieux sont les producteurs de combustibles fossiles et de métaux, qui tirent profit de la flambée des cours mondiaux. C’est aussi le cas du Nigeria qui devrait voir sa croissance s’améliorer en 2023 par rapport aux prévisions d’avril pour atteindre 3,2 %. Le rythme de croissance pour le pays, l’un des plus grands producteurs du continent de l’or noir est certes moins modeste comparé au dynamisme dont fait preuve certains pays de l’Afrique de l’Ouest nouvellement venu dans le cercle des pays producteurs ; mais ce rebond de croissance de l’économie nigériane est un bon cru comparé à ce qu’il était ces dernières années avec une activité économie en pleine récession durant plusieurs semestres. Et ce, en raison de la baisse de la production et de la conjugaison d’autres chocs internes (insécurité) et externes (crise mondiale qui a engendré une chute de la devise locale, le naira).

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Le cas du Nigeria conforte cette tendance d’une croissance africaine encore tirée par l’exploitation des ressources naturelles pour de nombreux pays africains notamment les hydrocarbures. Avec un baril qui tourne actuellement, et depuis le déclenchement de la crise ukrainienne, au tour de 100 dollars, les perspectives pour les pays exportateurs sont des plus prometteuses même si les pays importateurs vont devoir en pâtir. Dans ses dernières prévisions, la Banque mondiale qui anticipe une croissance de 5,5 % en 2022, soit son taux le plus élevé depuis 2016, pour ensuite ralentir à 3,5 % en 2023 pour l’Afrique subsaharienne, estime que:

« Cette bonne performance est toutefois inégale selon les pays et bénéficie surtout aux pays exportateurs de pétrole qui ont actuellement le vent en poupe grâce à l’envolée des prix des hydrocarbures, au détriment des pays importateurs ».

Mais malgré le relatif dynamisme dont semble faire preuve la croissance des pays africains, les défis structurels persistent et amplifient la nécessité d’approfondir les réformes pour une plus grande diversification de leurs économies et ainsi atténuer la dépendance aux matières premières dont l’apport n’est que conjoncture du fait de la volatilité des cours en raison de l’incertitude qui prévaut sur l’économie mondiale.  De ce fait, les pays producteurs de pétrole, particulièrement ceux qui auront à en tirer de large profit à cour et moyen termes se doivent de tirer les leçons du passé pour tirer pleinement profit de leurs ressources en faisant en sorte que les marges budgétaires ainsi dégagées servent de tremplin à des réformes visant une plus grande diversification du socle de leur économie et à veiller à ce que les fruits de cette croissance dynamique soit inclusive et durable.

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