samedi 6 décembre 2025
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Tribune : Méga-raffinerie Dangoté – comment l’infrastructure propulse le Nigéria dans une nouvelle ère énergétique

Mahaman Laouan Gaya et Aliko Dangote. (Crédit : Dr)

Située sur un terrain de 2635 hectares dans la zone franche de Ibeju-Lekki, dans l’Etat de Lagos au Nigéria, la « Dangote Petroleum Refinery and Petrochemicals » (DPRP) fraichement inaugurée est la plus grande raffinerie d’Afrique, la 6ème au monde, mais aussi la plus grande raffinerie de pétrole à « train unique » au monde. L’usine dispose d’un système unique intégré de distillation atmosphérique et sous-vide de pétrole brut. Une fois l’ouvrage pleinement opérationnel, il est prévu que le pays n’importera plus de produits pétroliers et le gouvernement nigérian va lever ses couteuses subventions aux importations de l’essence. Mais en matière de logistique, il serait difficile de mesurer les obstacles et les contraintes que les équipes d’Aliko Dangote ont dû soulever pour faire aboutir ce projet… Pour Africa Income, Mahaman Laouan Gaya, Ingénieur Pétrochimiste, Ancien Ministre de la République du Niger, Ancien Secrétaire Général de l’Organisation des Producteurs de Pétrole Africains (APPO) revient sur les challengers surmontés ainsi que les tenants et aboutissants de ce Méga-projet dans cette tribune.         

Par Mahaman Laouan Gaya, Ingénieur Pétrochimiste, Ancien Ministre de la République du Niger, Ancien Secrétaire Général de l’Organisation des Producteurs de Pétrole Africains (APPO)                      

La « Dangote Petroleum Refinery and Petrochemicals » (DPRP), a été inaugurée le 22 Mai dernier sur un terrain de 2635 hectares dans la zone franche de Ibeju-Lekki, dans l’Etat de Lagos au Nigéria. Je rappelle que les travaux de construction de cette raffinerie ne sont pas encore terminés ; le Président Muhammadu Buhari devant quitter le pouvoir le 29 mai 2023, a souhaité lui-même inaugurer en grande pompe ce méga projet. Selon le rapport de la « Nigerian Midstream and Downstream Petroleum Regulation Authority (NMDPRA) – Autorité Nigériane de Régulation des secteurs Amont et Intermédiaire Pétroliers« , la raffinerie de Dangote doit au préalable passer le test obligatoire d’acceptation technique (TAT) avant de démarrer ses activités. Étant donné que cette procédure prend techniquement, beaucoup de temps, l’exploitation de cette raffinerie ne pourrait pleinement commencer qu’en 2024. Aujourd’hui, on estime à près de 20 milliards dollars US le coût total des investissements et que 50% de ces investissements l’ont été sur fonds propres du Groupe Dangote et les autres 50% sur emprunts bancaires ; 70% des emprunts bancaires sont à ce jour remboursés. L’usine produira quotidiennement, 53 millions de litres d’essence, 34 millions de litres de diesel, 2 millions de litres de Jet A1-aviation, du bitume et des produits de la synthèse pétrochimique (tous conformes aux spécifications Euro V). Elle a, en annexe une usine pétrochimique de production de polypropylène (900.000 tonnes) et une usine de fabrication d’engrais. Cette unité de fabrication d’engrais disposera de deux (2) lignes de production, chacune produisant chaque jour 2200 tonnes d’ammoniac et 4000 tonnes d’urée granulée. Pour son fonctionnement, elle va disposer d’une centrale électrique de 435 MW. Les raffineries de pétrole nécessitant beaucoup d’eau (pour alimenter les systèmes de refroidissement…), il a été prévu 177 réservoirs d’une capacité de 4,742 milliards de litres. Elle sera approvisionnée en pétrole brut par la plus grande infrastructure d’oléoducs sous-marins du monde (1100 km de long). 

« En matière de logistique, beaucoup ne sauront peut-être jamais ce que Aliko Dangote a dû endurer pour faire aboutir ce projet. »

En matière de logistique, beaucoup ne sauront peut-être jamais ce que Aliko Dangote a dû endurer pour faire aboutir ce projet. Sa construction a exigé du matériel qui pesait environ 3000 tonnes, alors que la capacité des ports du Nigéria (y compris Lagos-Apapa) est comprise entre 200 et 250 tonnes. Pour ce faire, il a fallu procéder à l’aménagement d’un nouveau port pour amener directement les cargaisons surdimensionnées à proximité du site, mais aussi faciliter l’approvisionnement en pétrole brut et l’exportation des produits issus de la raffinerie. Pour le transport terrestre du matériel et équipements du port jusqu’au site de la raffinerie, il a fallu des travaux de construction de routes spéciales. Notons que la plus grande grue au Nigéria a une puissance de 650 tonnes, alors qu’il fallait une grue de 5000 tonnes pour les besoins de soulèvement de certains équipements. Pire encore, il n’y avait alors que deux (2) grues de ce type d’une capacité de 5 000 tonnes dans le monde, et qui étaient toutes en service ; alors, au lieu de louer une pour 300.000 dollars US par jour, Aliko Dangote a préféré carrément en acheter. À l’intérieur de l’usine même, il a été construit environ 126 km de routes bitumées. Pour ce qui est des ressources humaines, Alhaji Aliko Dangote a mis en formation neuf cents (900) jeunes ingénieurs en technologie de raffinage de pétrole à l’extérieur du pays, six (6) ingénieurs en mécanique formés à l’Université GE en Italie, cinquante (50) ingénieurs en process formés par Honeywell/UOP et cinquante (50) cadres en management. Lorsqu’elle sera pleinement opérationnelle, elle fournira 135.000 emplois permanents. Sur place, il y a plus de 200 bâtiments construits pouvant accueillir environ 50.000 employés et leurs familles.

Les défis énergétiques du Nigéria et de ses voisins liés à la mise en service de la DPRP

Lorsque la raffinerie sera pleinement opérationnelle, il est prévu que le Nigeria n’importera plus aucun produit pétrolier et aussi qu’elle permettra au gouvernement nigérian de lever une bonne fois pour toutes les très couteuses (et inutiles) subventions aux importations de l’essence. Au fil des années, ces subventions ont fait naître et entretenu, un important lobby des tradeurs-spéculateurs d’essence qui a délibérément œuvré à la faillite des quatre (4) raffineries publiques gérées par la NNPC (1 à Kaduna, 2 à Port Harcourt, et 1 à Wari). Lors de la cérémonie d’inauguration de la DPRP, le Directeur Général de la  » Nigeria National Petroleum Corporation  » (NNPC), Mr Mele Kyari disait d’ailleurs qu’il « est très, très difficile pour l’Etat de continuer à payer chaque année 4800 milliards de nairas (soit 10,33 milliards dollars US de subvention par an !) ». Tous les grands candidats aux dernières élections présidentielles avaient, durant la campagne, promis qu’une fois élu, ils suspendraient les subventions aux importations de l’essence. Comme il fallait s’y attendre, dans son discours d’investiture le lundi 29 mai 2023, le nouveau Président Ahmed Tinubu annonçait la suppression totale de cette subvention, qui il faut le rappeler est un système qui nourrit la corruption et assèche les caisses publiques. Dès le 30 mai 2023, la décision fut officiellement confirmée et elle devrait prendre effet ce 1er juillet 2023. Le carburant devrait alors passer du prix officiel à la pompe de 185 nairas (0,37 Euro) à 550 nairas (1,11 Euro). Mais dès l’annonce de cette mesure, les prix ont tout de suite flambé au point d’atteindre le plafond de 700 nairas (1,41 Euro) le litre à Abuja. Si cette tendance perdure, il est fort à craindre que l’essence en vente dans les pays limitrophes aille frauduleusement se retrouver sur les marchés noirs au Nigeria, et l’occasion est toute trouvée par certains gouvernements pour justifier une augmentation artificielle du prix du litre d’essence dans leur pays. Les voisins producteurs de pétrole (Niger, Tchad, Cameroun), avec les insignifiantes productions de leurs raffineries risqueraient de se trouver en situation de « panne sèche ». Pour combien de temps ? 

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Toutefois, il ne fait aucun doute que la subvention du carburant a un impact très négatif sur les finances de l’Etat fédéral nigérian et qu’il aurait été fiscalement irresponsable de la conserver indéfiniment. Cette levée de subvention crée déjà un immense mécontentement chez les consommateurs, même si par ailleurs, elle permettra d’arrêter définitivement la corruption et la spéculation sur les produits pétroliers et les finances fédérales de gagner annuellement 4800 milliards de nairas (soit environ 9,70 milliards Euros). A sa pleine capacité (650.000 b/j), la DPRP couvrirait largement la demande totale du Nigeria en produits raffinés (450.000 b/j), et comme il est aussi question de réhabilitation des quatre (4) raffineries nationales en souffrance (capacités cumulées de 445.000 b/j), en sus des autres raffineries modulaires privées (de très petites capacités) du pays (la Walter Smith refinery, la OPAC refinery, la Niger Delta Petroleum refinery et la Edo Petroleum refinery), la production totale du pays en produits raffinés doublera la consommation nationale. Le lundi 22 Mai 2023 à la tribune de la cérémonie d’inauguration de la raffinerie, Aliko Dangote a promis de « reproduire ce que le groupe Dangote a déjà réalisé sur le marché du ciment et des engrais, en faisant passer le Nigeria d’importateur à exportateur net ». Pour l’homme le plus riche d’Afrique, c’est une question de détermination et d’obstination, imprégnée d’un courage qui porte aujourd’hui ses fruits.

Agriculture : OCP, le géant marocain du phosphate prévoit d’ouvrir une usine d’ammoniac vert de 7 milliards de dollars

A plus long terme, l'OCP envisage de renforcer sa chaîne d'approvisionnement domestique, notamment en construisant une usine à Tarfaya, dans le sud du Maroc. D'ici 2026, l'usine devrait produire 200 000 tonnes d'ammoniac par an, passant à 1 million de tonnes d'ici 2027 et 3 millions de tonnes d'ici 2032.

L’Office Chérifienne des phosphates (OCP) du Maroc a annoncé des investissements de 7 milliards de dollars dans une usine d’ammoniac utilisant de l’hydrogène vert, produit à partir de carburant renouvelable, selon les informations relayées par Reuters le 20 juin. OCP, l’une des plus grandes sociétés de phosphates et d’engrais au monde cherche à augmenter sa production et à atteindre ses objectifs de faible émission de carbone, dans un contexte de hausse des prix soutenus par le conflit Russo-ukrainienne.

L’OCP du Maroc prévoit de construire une usine d’ammoniac vert de 7 milliards de dollars pour prévenir des difficultés d’approvisionnement. L’entreprise publique OCP est l’un des plus gros importateurs d’ammoniac, dépensant 2 milliards de dollars pour la matière première l’année dernière alors que la guerre en Ukraine faisait grimper les prix mondiaux. L’impact de la guerre sur les approvisionnements a également accru l’importance mondiale d’OCP et son orientation vers les énergies renouvelables. C’est un élément important d’une stratégie industrielle marocaine visant à réduire les importations d’énergie. Pour compenser ses difficultés d’approvisionnement, l’OCP a conclu un accord pour acheter de l’ammoniac d’Amérique du Nord cette année, a-t-il déclaré dans les colonnes de Reuters. A plus long terme, il envisage de renforcer sa chaîne d’approvisionnement domestique, notamment en construisant une usine à Tarfaya, dans le sud du Maroc. D’ici 2026, l’usine devrait produire 200 000 tonnes d’ammoniac par an, passant à 1 million de tonnes d’ici 2027 et 3 millions de tonnes d’ici 2032. Son projet d’utiliser l’hydrogène produit à partir de l’électrolyse solaire et éolienne comme matière première pour fabriquer de l’ammoniac fait partie d’une stratégie de 13 milliards de dollars que la société a annoncée en décembre pour passer aux énergies renouvelables.

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Le Maroc a beaucoup investi dans les énergies renouvelables, en partie parce qu’il a un potentiel énormes en éolienne et énergie solaire, mais aussi parce qu’il manque de pétrole ou de gaz et entretient des relations difficiles avec son voisin algérien producteur d’hydrocarbures. Le gouvernement souhaite porter les énergies renouvelables à 52% de la capacité électrique installée contre 38% d’ici 2030 et fait également pression pour une augmentation du dessalement pour aider les villes et l’agriculture à faire face à l’impact des années de sécheresse.  L’entreprise publique OCP a déclaré qu’elle prévoyait de s’appuyer entièrement sur l’eau dessalée pour ses opérations industrielles d’ici 2027 et a déclaré à Reuters qu’elle lancerait des appels d’offres au début de l’année prochaine pour étendre la capacité de dessalement à Safi et Jorf Lasfar sur l’Atlantique. Son projet Tarfaya porte sur une usine de dessalement alimentée par des énergies renouvelables d’une capacité de 60 millions de mètres cubes par an pour alimenter les installations industrielles.

L’Afrique une priorité pour l’OCP

En 2022, la guerre en Ukraine avec à la clé la hausse des prix a permis à OCP d’enregistrer des revenus de 11,29 milliards de dollars, en hausse de 40 % par rapport à 2021, et un bénéfice net de 4,9 milliards de dollars, en hausse de 38 %. Les bénéfices ont chuté cette année en raison de la baisse des prix, mais OCP s’attend à ce qu’ils se redressent au second semestre. « Nous allons augmenter notre production pour répondre à la demande supplémentaire », a déclaré OCP à Reuters qui possède les plus grandes réserves de phosphate au monde et prévoit d’augmenter la capacité de production d’engrais à 15 millions de tonnes cette année et à 20 millions de tonnes en 2027. La société a promis d’allouer 4 millions de tonnes de production d’engrais au marché africain, où elle a mis en place des unités de mélange et cartographié la composition des sols sur 30 millions d’hectares pour aider à produire des engrais personnalisés. Les investissements d’OCP en Afrique subsaharienne ces dernières années, où l’approvisionnement en engrais est crucial pour le développement économique, reflètent l’expansion d’autres entreprises marocaines sur le continent qui a servi à étayer un engagement diplomatique accru. OCP a déclaré à Reuters qu’il commencerait la production dans son usine d’engrais au Nigeria fin 2026 et lancerait la même année une étape de pré-production dans son usine éthiopienne.

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Chronique : Aéronautique, un juteux filon en Afrique ?

L’industrie aéronautique mondiale pèse des milliards de dollars et contribue de manière significative à l'économie. Selon l'Association internationale du transport aérien (IATA), l'aviation commerciale soutient directement ou indirectement environ 65,5 millions d'emplois dans le monde et contribue à plus de 2,7 milliards $ au PIB mondial, soit environ 3,6 %. (Crédit : Dr).

S’il y a un secteur où les marges peuvent être importantes en Afrique, c’est bien celui de l’aéronautique. A l’image du reste du monde, il joue un rôle significatif dans l’économie. Néanmoins, vu la profondeur de la filière qui va de la fabrication d’aéronefs (avions commerciaux, avions militaires, hélicoptères, etc.), aux bureaux d’études, en passant par la fourniture de services de maintenance et de réparation, ainsi que les activités liées aux services aéroportuaires et à la gestion du trafic aérien. Il est nécessaire de l’accompagner, de le soutenir et d’apprêter son cadre.

L’industrie aéronautique mondiale pèse des milliards de dollars et contribue de manière significative à l’économie. Selon l’Association internationale du transport aérien (IATA), l’aviation commerciale soutient directement ou indirectement environ 65,5 millions d’emplois dans le monde et contribue à plus de 2,7 milliards $ au PIB mondial, soit environ 3,6 %. Quant au transport de passagers, via l’aviation commerciale l’IATA l’estimait, en 2019, à environ 4,5 milliards de passagers. Excepté les années Covid, ce nombre a été en constante augmentation. Depuis l’après Covid d’ailleurs, il est reparti de plus belle. Le constat, fait sur des applications mobiles, telles que FlightRadar, révèle que notre continent accuse un sacré retard. Cette configuration reflète l’implantation des grandes compagnies aériennes et constructeurs d’aéronefs qui jouent un rôle majeur dans l’industrie aéronautique. Des sociétés, telles qu’Airbus, Boeing, Lockheed Martin, Embraer, Bombardier et bien d’autres sont des acteurs clés dans la fabrication d’aéronefs et génèrent des revenus importants. Aucun de ces constructeurs n’est africain. En termes de compagnies aériennes, certaines du continent arrivent à tirer leur épingle du jeu, faisant du point à point, étoffant leur flotte, mais restent très en deçà de mastodontes, telles qu’American Airlines Group (États-Unis), Delta Air Lines (États-Unis), United Airlines (États-Unis), Lufthansa Group (Allemagne), Air France-KLM (France), International Airlines Group (IAG) – comprenant British Airways, Iberia, Aer Lingus, Vueling, etc. (Royaume-Uni/Espagne/Irlande), China Southern Airlines (Chine), Southwest Airlines (États-Unis), China Eastern Airlines (Chine), Emirates (Émirats arabes unis) – classées selon leur chiffre d’affaires 2021, par l’IATA.

Forte valeur ajoutée et catalyseur d’innovation technologique

Hautement technologique, l’industrie aéronautique est un moteur d’innovation. Les progrès dans la conception aérodynamique, les matériaux composites, les moteurs plus efficaces, les systèmes de contrôle de vol avancés, l’électronique embarquée, l’avionique et bien d’autres domaines ont permis d’améliorer la sécurité, la performance et l’efficacité des avions. Depuis les succès de Solar Impulse, des études sérieuses sont faites pour quitter le moteur thermique et privilégier le solaire et l’hydrogène… Dans un premier temps, les pays africains qui optent pour implanter des aéropoles (Plug & Play), forment leur jeunesse aux métiers afférents, peuvent tirer profit des chaînes d’approvisionnement.  L’industrie aéronautique repose en effet sur une vaste chaîne d’approvisionnement mondiale. Des milliers de fournisseurs et de sous-traitants dans différents pays contribuent à la fabrication des composants et des systèmes nécessaires à la construction d’aéronefs. Cette chaîne d’approvisionnement crée des emplois et stimule l’activité économique dans de nombreuses régions.  Les Etats africains plus ambitieux peuvent réussir la migration allant de la sous-traitance au produit fini (aéronef, semi-conducteur, câblage, moteur vert, batteries…)

Plus que des fonds d’amorçage

L’accompagnement du numérique et de l’innovation dans l’aéronautique est crucial pour l’industrie aérospatiale. Les progrès technologiques rapides dans le domaine numérique offrent de nombreuses opportunités pour améliorer l’efficacité, la sécurité et les performances globales des avions et des opérations aériennes. Les pays africains qui comptent miser sur le secteur gagneraient à y injecter des fonds conséquents. Certes, il faudra des fonds d’amorçage pour mettre le pied à l’étrier de startups innovantes, mais dans ce secteur très capitalistique, des capitaux plus importants, apportés en financements innovants seraient une condition sine qua non.  Jugez vous-mêmes, dans le domaine du numérique, plusieurs domaines d’application se démarquent. Les outils de conception et de modélisation assistés par ordinateur permettent aux ingénieurs de développer et de tester virtuellement des aéronefs et leurs composants. Cela réduit les coûts et les délais de développement, tout en améliorant la précision et la qualité des conceptions. Quant à la fabrication additive ((impression 3D) elle permet de créer des pièces complexes et légères directement à partir de modèles numériques. Cela offre des avantages en termes de poids, de résistance et de flexibilité de conception, ainsi que la possibilité de produire des pièces de rechange rapidement et localement.

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L’utilisation de capteurs et de l’Internet des objets (IoT) permet de collecter des données en temps réel sur les performances et l’état des aéronefs. On parle alors de maintenance prédictive. Ces données peuvent être analysées pour détecter les anomalies, prévoir les pannes et planifier la maintenance de manière proactive, réduisant ainsi les temps d’immobilisation des avions. Aujourd’hui, les technologies numériques ont permis le développement de cockpits plus avancés avec des écrans multifonctions, des commandes électroniques et des systèmes d’assistance au pilotage. Last but not least, l’intelligence artificielle et l’apprentissage automatique jouent un rôle croissant dans l’aéronautique. Ils sont utilisés pour l’optimisation des trajectoires de vol, la gestion du trafic aérien, l’analyse des données de vol, la détection des fraudes et la sécurité des systèmes.

S’impliquer

Pour soutenir toutes ces initiatives, de nombreuses organisations, notamment les constructeurs aéronautiques, les fournisseurs de technologie et les universités, doivent travailler en étroite collaboration pour promouvoir la recherche et le développement (R&D) dans le domaine de l’aéronautique numérique. Les gouvernements et les organismes de réglementation gagneraient à s’impliquer pour garantir la sécurité et la conformité réglementaire de ces nouvelles technologies. En somme, l’accompagnement du numérique et de l’innovation dans l’aéronautique permet, non seulement de repousser les limites de l’efficacité, de la sécurité et de la durabilité dans cette industrie cruciale, mais aussi de permettre à l’Afrique de combler son retard. Ces avancées continueront à façonner l’avenir de l’aéronautique en proposant des aéronefs plus performants, des opérations plus efficaces et une expérience de vol améliorée pour les passagers et l’équipage. Cette image d’aéroports internationaux de grandes villes africaines, avec juste un ou deux avions sur le tarmac, serait ainsi aux oubliettes.

Article publié le 19 juin 2023

Hôtellerie – Afrique : le Forum AHIF 2023 se penche sur l’optimisation des chaines d’approvisionnement

Peter Greenberg, Lara Dupre, Vimbai Masiyiwa et Clemence Lormand en discussion sur la façon ces panélistes dirigent leurs entreprises et les divers procédés dans leur leadership.(Crédit : Dr).

Réunis du 12 au 14 juin à Nairobi, lors du Forum annuel de l’investissement hôtelier en Afrique (AHIF) 2023, les leaders de l’hôtellerie ont placé au cœur de leurs discussions, les défis relatifs aux chaînes d’approvisionnement du secteur. Il s’agit de déterminer comment les mesures commerciales intra-africaines, la technologie et une nouvelle génération de leaders de l’hôtellerie remettent en question les procédés en vigueur dans le secteur promis à un bel avenir.

Cette semaine, des dirigeants du secteur de l’hôtellerie se sont réunis à Nairobi, la capitale du Kenya pour assister au Forum annuel de l’investissement hôtelier en Afrique (AHIF). Au menu, des discussions sur les opportunités de croissance dans la région et le partage d’information sur les développements commerciaux et opérationnels du secteur. Parmi les participants, le PDG de Toggle Market, Fuad Sajdi, et le vice-président pour l’Afrique, Abraham Muthogo Kamau. Ils ont mené des discussions sur l’exploitation de l’approvisionnement local et régional et sur les moyens innovants utilisés par les hôteliers pour réduire les coûts opérationnels. Les panélistes sont partis du constat que pendant plusieurs années, les dirigeants africains de l’hôtellerie ont travaillé d’arrache-pied pour maintenir les normes opérationnelles lorsque les produits critiques ne sont pas disponibles pour des raisons liées aux restrictions commerciales, aux mauvaises infrastructures de transport, aux fluctuations monétaires et aux ruptures de la chaîne d’approvisionnement. Les défis à relever dans la chaine d’approvisionnement des hôtels en Afrique ont été l’un des principaux obstacles à la croissance et à la diversification dans le secteur. En effet, les entreprises hotellières paient des prix gonflés pour des produits consommables et opérationnels importés. Aussi les pays africains peinent à répondre aux besoins du marché régional en raison de la faiblesse des réglementations intra-commerciales, estiment les spécialistes réunis à Nairobi.

Des signes prometteurs en dépit des faiblesses structurelles dans la logistique hôtelière

Les experts du secteur hôtelier réunis au AHIF 2023 reconnaissent néanmoins les prémices d’un statu quo qui évolue rapidement. En effet, l’industrie hôtelière africaine est en pleine transformation. Les catalyseurs ? Des mesures commerciales révolutionnaires, une technologie en évolution rapide et une nouvelle génération de leaders. Ces forces remettent en question l’état d’esprit traditionnel du « business as usual » et remodèlent le paysage de l’hôtellerie africaine. La Zone de libre-échange continentale africaine (AfCFTA), la plus grande zone de libre-échange au monde depuis la création de l’Organisation mondiale du commerce, devrait renforcer considérablement le commerce intra-africain. En réduisant les barrières commerciales, il permet une circulation plus fluide des biens, des services et des personnes à travers les frontières. L’effet d’entraînement devrait être profond, le secteur de l’hôtellerie étant l’une des nombreuses industries récoltant les bénéfices de cette intégration régionale, ont analysé les spécialistes.

« Il y a un changement de paradigme majeur en cours avec des politiques commerciales progressistes et une technologie de pointe. Cette nouvelle génération de dirigeants est sur le point de redéfinir l’essence de l’hospitalité en Afrique. Nous sommes ravis de participer cette année à AHIF 2023 qui se poursuit année après année, pour aider à façonner l’industrie hôtelière africaine et mettre en lumière les opportunités d’investissement », a déclaré Abraham Muthogo Kamau, vice-président de l’Afrique chez Toggle Market.

Dans ce processus, la technologie est considérée comme le moteur de la transformation. La numérisation imprègne toutes les facettes de l’expérience hôtelière, des systèmes de réservation au service de chambre, avec un nombre croissant d’hôtels utilisant désormais une forme de technologie de chambre intelligente ou employant des services basés sur l’IA tels que les chatbots pour le service client et offrant des applications mobiles pour les réservations et services, ont précisé les panélistes. L’on considère également que l’intégration de la technologie a amélioré l’efficacité et la durabilité du secteur. Les hôtels africains peuvent voir jusqu’à 30% d’augmentation de l’efficacité énergétique et 25% de réduction de la consommation d’eau, grâce à l’adoption de technologies intelligentes.

Baisse de 15% des délais de livraisons dans l’approvisionnement des hôtels en 2022

Une enquête récente a révélé que le délai moyen de livraison des fournitures avait chuté de 15 % en 2022. Cette amélioration est due à des processus transfrontaliers plus rationalisés et à la mise en œuvre de systèmes numériques de gestion de la chaîne d’approvisionnement. De plus, l’utilisation accrue de cette technologie a conduit à des systèmes plus résilients et réactifs. De plus en plus de chaînes hôtelières peuvent désormais suivre leurs livraisons en temps réel, prévoir la demande avec plus de précision et réagir rapidement aux évolutions du marché.

« Alors que le commerce intra-africain continue de prospérer et que le paysage technologique évolue, le secteur hôtelier africain se prépare à un avenir exaltant. Cette nouvelle ère est inaugurée par des dirigeants ambitieux et férus de technologie qui sont prêts à se débarrasser de l’ancien système et à faire émerger le nouveau », a conclu le communiqué du AHIF 2023.

L’Afrique ne reçoit que 5% de la part régionale du tourisme mondial. Ce chiffre est en hausse après la crise de Covid avec 47 millions de touristes retournant sur le continent en 2022 après le pic de 69 millions en 2019. L’OMT prévoit 134 millions de visiteurs d’ici 2035, ce qui en fait la deuxième région touristique à la croissance la plus rapide après l’Asie-Pacifique. Il existe également un tourisme intérieur robuste et en croissance en Afrique, car de plus en plus de familles de la classe moyenne et de jeunes voyageurs optent pour des voyages plus locaux et régionaux.

Maroc : AMPF, hôte de la Journée mondiale du froid à Casablanca

De gauche à droite, Saïd el Harch, President AMPF, Steve Gill, Fondateur WRD, et Madi Sakandé, President U-3ARC. (Crédit : Dr).

C’est le 13 juin dernier que l’Association marocaine des professionnels du froid (AMPF) a organisé la 5ème Edition de la Journée Mondiale du Froid (WRD) à Casablanca. Cette journée, célébrée normalement le 26 juin de chaque année a été avancée cette année, en raison dans la fête d’Aïd El Kébir (fête du Mouton ou Tabaski) proche.

Après des mots de bienvenue, du Président de l’AMPF, M. Saïd El Harch, qui a placé cette célébration, dont le thème porte sur « Le Froid, clé du développement socio-économique », dans son contexte, a été entamée la session d’ouverture animée par un panel composé de MM. Steve Gill, fondateur de la World Refrigeration Day (WRD), Madi Sakandé, Président de l’Union des Associations des Acteurs Africains de la Réfrigération et de la Climatisation (U-3ARC), Samir Rachid, Dg IRESEN (Institut de Recherche en Energies solaires et Energies nouvelles) et Mohamed el Haouari de l’AMEE (Agende marocaine pour l’Efficacité énergétique). Il n’a pas omis de rappeler que le froid n’est pas un luxe, mais plutôt une nécessité que tous les participants peuvent apprécier dans chacune de leurs activités respectives, depuis leur lever jusqu’au moment où il tenait ses propos…

Au centre de la société

Le fondateur de la WRD en a profité pour rappeler l’origine de la création de la journée, le 26 juin de chaque année, en commémoration de la naissance de l’échelle Kelvin, de ses appréhensions, de l’engouement de la première en 2019, des perspectives, notamment mieux communiquer avec ceux extérieurs au secteur, voire délivrer des solutions de réfrigérations écoresponsables. Lui emboitant le pas, le président U-3ARC, reviendra sur la genèse de cette organisation panafricaine, qui milite pour un secteur du froid à même d’apporter des solutions à l’immigration clandestine, tant il y a à faire. De son avis le frigoriste est au centre de la société vu la transversalité de sa profession. Il trouve que si les décideurs politiques jouent le jeu, ce secteur pout apporter un sacré coup de fouet au développement du continent.

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Samir Rachidi, DG IRESEN, est, quant à lui, revenu sur les missions de cette structure qu’il dirige et qui existe depuis 12 ans. Autant les moyens mis dans la recherche aux niveaux académique et professionnel, que l’accompagnement de projets de recherche (76 au total) ont permis des résultats probants. Résultats des courses, des projets de recherche financés, des startups créées, des brevets déposés (03), notamment dans la climatisation solaire… « Aussi compte tenu du fait que c’est un secteur énergivore, le sujet d’aujourd’hui n’est pas un luxe », a-t-il assuré après avoir appris que c‘est un secteur qui consomme 20% de l’énergie globale, sachant que dans le reste du continent et dans les pays en voie de développement ce rapport est plus important. Dans certains pays, la chaine du froid est quasi-inexistante, a-t-il déploré. Les pertes post agricoles, avec pour corollaire une souveraineté alimentaire qui file entre les doigts… ont été auscultées.

Fluides frigorigènes alternatifs inflammables

Le représentant du DG de l’AMEE, M. Mohamed el Haouari, a magnifié les relations avec AMPF, devenu un partenaire sérieux, ainsi que l’importance d’un secteur qu’il trouve transversal. L’AMEE, qui œuvre dans les domaines énergétique et environnemental, plaide pour une optimisation de la consommation énergétique, la réglementation, les normes et la l’accompagnement. Cette première session a été suivie par un débat riche, venu confirmer la primauté d’un secteur pour le développement socio-économique ; jusqu’à ce que la FAO inscrive dans un récent rapport la question du froid. Le président U-3ARC envisage dans ce sens une prochaine visite à la Commission Energie de l’UA à Addis Abeba, par suite du MoU signé avec IIF (Institut international du Froid).  Le panel, qui a suivi et portant sur « Les Fluides frigorigènes alternatifs inflammables et naturels », a captivé la salle. Le pourquoi du changement, les normes, la toxicité, le caractère inflammable, la sécurité, les compétences des techniciens… jusqu’à l’idée d’une certification unique, rien n’a été occulté.

Afrique :  La BADEA approuve 577 millions USD pour financer 9 projets sociaux dans la région

Le conseil d’administration de la Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) a approuvé le financement de 9 projets à impact social en Afrique de l’Ouest, du Centre et de l’Est. Des investissements pour combler le retard de développement du continent, conformément aux objectifs 2030 de l’institution financière multilatérale notée « AA » et détenue par 18 pays arabes.

La Banque arabe pour le développement économique en Afrique (BADEA) finance à hauteur de 577 millions de USD des projets dans les secteurs prioritaires de développement en Afrique. Ces nouveaux investissements visent à combler le retard de développement en Afrique, conformément aux objectifs fixés par la stratégie 2030 de la BADEA, les objectifs de développement durable des Nations Unies et l’Agenda 2063 de l’Union africaine.

L’accès à l’eau au cœur des Financements BADEA à l’Île Maurice

Pour l’Île Maurice et le Niger, il s’agit notamment de deux projets du secteur public et une subvention pour le renforcement des capacités d’une valeur de plus de 100millions USD avec un accent particulier sur éducation des filles au Niger et la fourniture d’eau potable dans les zones rurales de l’île Maurice. Le premier prêt souverain de 50 millions de dollars a été alloué au barrage de la « Rivière des Anguilles » au sein de la région des savanes, au sud de l’île Maurice. Ce projet intégré permettra une continuité de l’approvisionnement en eau potable et irrigable destinée à la population locale de 70 000 habitants, qui luttent contre les pénuries d’eau pendant la saison sèche. Le projet sera cofinancé par le Fonds saoudien pour le développement, le Fonds OPEP pour le développement international, le Kuwait Fund et le gouvernement mauricien. Une subvention de 500 mille dollars a également été a allouée au gouvernement du Maurice pour une étude de faisabilité détaillée de la mise en place d’infrastructures dans le transport, l’irrigation, et la distribution d’eau en aval du barrage « des rivières d’anguille ».

Priorité à l’éducation des filles au Niger pour la BADEA

Au Niger, le financement d’infrastructures pour l’accès des jeunes filles à une éducation de qualité a été approuvé. Un prêt souverain de 50 millions de dollars a été approuvé pour la construction de nouveaux internats dédiés exclusivement aux filles et à la réhabilitation d’anciennes écoles. Cofinancé avec AGFUND, la Banque Islamique de Développement, le Fonds OPEP pour la Développement et le gouvernement du Niger, ce projet d’éducation et d’infrastructure fait partie intégrante d’un vaste projet de la BADEA et de ses partenaires pour soutenir le gouvernement Niger dans la promotion de l’éducation des jeunes dans les zones reculées à faible taux de scolarisation. Et ce, pour augmenter l’accès des filles à l’éducation et fournir les meilleurs équipements nécessaires à leur réussite en remplaçant les anciennes structures scolaires par des structures modernes, alimentées à l’énergie solaire, ainsi que des salles de classe et des dortoirs dotés de technologies. Au total, plus de 2300 nouvelles écoles (dont 50 nouveaux internats pour filles) seront construites avec une capacité de plus de 80 000 étudiants par an, dont plus de 17 000 filles, pour lutter contre les inégalités liées aux genres dans le secteur de l’éducation et offrir des services de meilleure qualité et conditions d’apprentissage.

Financer le secteur privé

Au titre du Secteur privé et du financement du commerce, six (6) nouvelles facilités ont été approuvées d’un montant de 477 millions USD au profit des institutions partenaires de l’Est, du Centre, et de l’Ouest africain. Les lignes de financement seront utilisées pour financer des projets clés du secteur privé, accroître l’accès au financement des PME avec un accent particulier sur les femmes et les jeunes, et pour financer le commerce par l’importation et l’exportation de matières premières stratégiques dans divers secteurs. Ces nouvelles approbations substantielles continuent de s’appuyer sur l’élan de mai 2023 où il a été signé cinq (5) accords de prêt à fort impact d’un montant de 186 millions USD millions avec cinq pays, selon le communiqué de la BADEA.

La BADEA, une banque arabe au service de l’Afrique

La BADEA est une institution financière multilatérale de développement notée « AA » détenue par 18 pays arabes. La Banque a été fondée en 1974 dans le but de favoriser, soutenir et renforcer la coopération économique, financière et technique entre les pays arabes et africains. L’impact social est au cœur des priorités de la BADEA et de la stratégie « BADEA 2030 ». Pour réaliser sa mission, la Banque joue principalement un rôle de catalyseur et propose plusieurs instruments financiers allant des prêts souverains avec une prédominance des projets dans les infrastructures, le commerce et le secteur privé, la chaîne de valeur agricole, l’entrepreneuriat et le développement des PME. La Banque accorde également des subventions non remboursables pour le renforcement des capacités afin de soutenir des projets de développement clés en Afrique subsaharienne.

Guinée-Bissau: sanctionné aux législatives pour un bilan peu reluisant, le Président Embaló condamné à rebondir pour sauver son mandat

Le président bissau-guinéen, Umaro Sissoco Embalo, tient une conférence de presse conjointe avec son homologue portugais au palais de Belém à Lisbonne lors de sa visite officielle au Portugal le 8 octobre 2020. (Photo de CARLOS COSTA / AFP)

L’annonce, le 8 juin dernier par la Commission électorale des résultats des législatives anticipées du 4 juin 2023 ont été un véritable camouflet pour le Président bissau-guinéen Umaro Sissoco Embalo dont la coalition, le Madem G5, n’a remporté que 29 sièges contre 54 sièges sur les 102 sièges en jeu pour la coalition de l’opposition Pai-Terra Ranka. Désormais condamné à nommer un gouvernement de cohabitation, le chef de l’Etat voit ses marges de manœuvres de plus en plus réduites alors que pour beaucoup d’observateurs, sa défaite électorale s’explique en grande partie par son bilan peu reluisant notamment sur le plan économique où l’instabilité politique et surtout la chute des prix de la noix de cajou, principale source de recettes d’exportations du pays, a contrarié l’atteinte des objectifs de son ambitieux plan stratégique « Terra Banka » qu’il a dévoilée en grande pompe lors de son arrivée au pouvoir en 2020.

En mai 2022, lorsqu’il avait dissous l’Assemblée nationale déjà dominée à l’époque par le PAIGC, le principal parti de l’opposition, le chef de l’Etat bissau-guinéen avait invoqué de « divergences persistantes ne pouvant être résolues » avec le Parlement qui selon lui « un espace de guérilla politique et de complot ». Presque une année après, les résultats provisoires proclamés le 8 juin dernier par la Commission électorale indépendante des élections législatives anticipées du 8 juin dernier ont sonné comme un cinglant désaveu pour le Président Umaro Sissoco Embalo. Les électeurs se sont bien rendus aux urnes pour un scrutin qui a été qualifié par les observateurs de « libre, transparent et apaisé », une des rares fois dans le pays depuis son indépendance en 1974, et ont donné une large victoire à la coalition Pai-Terra Ranka du PAIGC qui a remporté la majorité absolue à l’Assemblée nationale avec 102 sièges. La coalition soutenant le Président, le Madem G15  n’a obtenu que 29 sièges, ce qui condamne le chef de l’Etat a nommé dans les prochains jours à nommer un Premier ministre issue des rangs de l’opposition ainsi qu’un gouvernement de cohabitation. De l’avis de plusieurs analystes avisés de la scène politique locale, cette défaite est certes imputable aux dissensions qui minent depuis quelques temps la coalition au pouvoir mais aussi et surtout, à l’incapacité du Président Embaló à résoudre le problème de la chute du prix de la noix de cajou, source importante de revenus pour la population et principal produit d’exportation et donc d’entrée de devises du pays.

Un bilan économique peu reluisant et des ambitions contrariées par des chocs internes et externes

Les résultats du scrutin législatif du 4 juin dernier s’interprètent donc comme ceux d’un vote sanction pour le Chef de l’Etat, arrivé au pouvoir en 2020 avec un ambitieux programme économique adossé à un Plan Stratégique Guinée 2025 qui vise à développer durablement les ressources naturelles renouvelables et les filières de niche. Dénommé « Terra Banka« , ce plan aux objectifs tout aussi ambitieux était destiné à impulser le progrès social dans ce petit pays d’Afrique de l’ouest. Avec une population de 2 millions d’habitants et un PIB estimé à 1,6 milliards de dollars en 2021, la Guinée-Bissau présente des indicateurs socio-économiques parmi les plus faibles au monde. L’instabilité chronique que connait le pays depuis son indépendance en 1974 avec une succession de guerre civile et de coups d’Etat n’a jamais permis au pays d’amorcer véritablement son décollage socio-économique d’autant que le pays ne jouissait que de peu d’atouts favorables comparatifs.

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L’arrivée au pouvoir de l’ancien général, élu en fin 2019 mais investi en février 2020, a soufflé pourtant un vent d’espoir pour le pays. Avec son Plan stratégique « Terra Banka », le nouveau pouvoir avait pour ambition de valoriser durablement les ressources naturelles renouvelables et de structurer des filières créatrices de nouvelles richesses et d’emplois. Le pays qui compte une population composée de 60% de jeunes de moins de 25 ans que le chef de l’Etat veut impliquer dans la diversification de l’économie portée principalement par le secteur piscicole, du tourisme et surtout la culture de la noix de cajou.

« Notre pays est vierge. Le seul produit que nous exportons chaque année vers l’Inde et le Viêt-Nam, et nous sommes leaders sur le segment, c’est l’anacarde. Les noix de cajou génèrent d’importants revenus pour l’Etat. Nous avons aussi l’agriculture et aussi la pêche qui sont aussi des piliers importants pour notre économie. Et il est désormais avéré que notre pays regorge de réserves pétrolières que nous n’avons certes pas encore commencé à exploiter», mettait fièrement en avant à l’époque le nouveau maître de Bissau qui rêvait alors grand pour son petit pays.

«J’ai un slogan qui dit il n’y a pas de petits Etats, il n’y a que des Etats. C’est vrai que nous sommes un pays pauvre mais je crois beaucoup en la solidarité sud-sud, mais surtout en la solidarité africaine pour me pousser», ne cessait-il de répéter dans les médias à chaque fois que l’occasion se présentait. Bien que peu résiliente face aux chocs économiques internes et externes, les perspectives de croissance du pays étaient alors des plus favorables. Malheureusement, les démons du passé ont ressurgit quelques mois après l’arrivée au pouvoir d’Umaro Sissoco Embaló, avant que des vents contraires ne viennent assombrir les perspectives de relance économique qui se profilait pour le pays. Les dissensions politiques ont refait surface au sein même de la coalition puis portées au Parlement que le Chef de l’Etat a fini par dissoudre en mai 2022. Quelques mois auparavant, en février de la même année, une tentative de coup d’état a été déjouée de justesse à Bissau, la capitale du pays. Ces tensions politiques sont venues exacerbées des fragilités économiques  engendrées par des chocs externes avec les effets néfastes de la pandémie de la Covid-19 dès la première année de pouvoir du Président Embaló. Le pays qui exportait habituellement entre 200 .000  et 230.000 tonnes chaque année a vu sa production chuté à 160.000 en 2020, en raison de la crise sanitaire qui sévissait chez son principal acheteur, l’Inde, aux prises avec la pandémie du Covid-19. Comme un malheur qui n’arrive jamais seul, en pleins préparatifs des législatives anticipées, la guerre en Ukraine est venue amplifiée ces chocs. L’inflation s’est ainsi renforcer, atteignant 4,1 % en 2022, avant de redescendre à 3,2 % en 2023, en raison notamment de la hausse des prix du pétrole et des denrées alimentaires consécutive à la guerre russo-ukrainienne. La variabilité du prix de l’anacarde sur le marché, la persistance de l’instabilité politique ainsi que l’insolvabilité des entreprises publiques présentent aussi des risques majeurs sur les prévisions  de croissance de la Guinée Bissau et le gouvernement a dû faire recours au FMI pour faire face à la multiplication des chocs.

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Fin janvier 2023, le FMI est venu à la rescousse de l’ancienne colonie portugaise avec un plan triennal de réformes économique adossé à une aide financière de 38,4 millions de dollars. Le programme appuyé par la Facilité élargie de crédit (FEC) visait à améliorer la gestion des ressources budgétaires et des investissements publics, à accroître la transparence, mais aussi à bonifier les secteurs de l’éducation et de la santé, tout en réduisant la pauvreté. Concrètement, l’objectif visé selon les termes du programme convenu entre le gouvernement bissau-guinéen et le Fonds Monétaire international visait « la mobilisation des recettes, la rationalisation des dépenses, l’atténuation des risques budgétaires et des emprunts prudents devraient permettre de  réduire, à moyen terme, le déficit et la dette national) conformément aux critères de convergence de l’Union économique et monétaire ouest-africaine (UEMOA)». La Guinée-Bissau qui a été classé parmi les treize (13) pays africains présentant un «risque élevé» d’endettement dans le dernier rapport de la Conférence des Nations unies pour le commerce et le développement (CNUCED), publié en avril dernier, continue de faire face aux effets persistants des pressions inflationnistes mondiales. « La croissance économique estimée s’est ralentie en 2022 pour atteindre 4,2 %. La flambée des prix des produits de base associée à la guerre en Ukraine, en particulier des denrées alimentaires et des carburants, a porté l’inflation moyenne à 7,9 % et a contribué à l’aggravation du déficit des comptes courants », a indiqué le FMI dans une note d’information publiée en mai dernier, suite au premier décaissement de près de 4 millions de dollars au titre de la FEC.  

Des ressorts économiques pour rebondir mais à quel prix pour le président Embaló?

Selon le FMI,  « le rebond de l’économie, prévu cette année, reste menacé par d’importants risques de dégradation liés aux faiblesses intérieures, à une fragilité de longue date, à la volatilité des exportations de noix de cajou et aux retombées de la guerre entre la Russie en Ukraine. Ces facteurs pourraient avoir un impact supplémentaire sur les prix des denrées alimentaires et de l’énergie». En dépit des fragilités, l’économie du pays s’en sort relativement mieux que certains voisins de la sous-région. Il faut dire que l’année dernière, pour soutenir les agriculteurs, notamment la culture de la noix de cajou, le gouvernement a supprimé la taxe sur les agriculteurs et abaissé plusieurs taxes sur les intermédiaires et les exportateurs. A cela s’ajoute deux projets industriels majeurs annoncés en 2022 dans le secteur et qui pourront booster la production du pays tout en permettant aux agriculteurs d’améliorer leurs revenus et aussi d’espérer plus de recettes d’exportations pour les caisses de l’Etat. Il s’agit d’abord du complexe industriel annoncé par l’entreprise indienne Beta Group pour une enveloppe de 100 millions de dollars dans la filière anacarde et ensuite, celui de la compagnie chinoise Grupo Human qui a fait part de son intention d’acheter la quasi-totalité de la récolte de noix de cajou du pays et de construire dans un second temps, des unités de traitement sur place. De quoi donner un coup de pouce à l’industrie locale d’autant que malgré la volatilité des prix sur le marché international, la production de la noix de cajou a retrouvé son rythme d’avant la pandémie de la Covid-19.

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Des perspectives favorables et des ressorts pour rebondir avec un réajustement du Plan stratégique « Terra Banka » mais qui restent conditionnées par le maintien de la stabilité politique. Et c’est là que le pari est loin d’être gagner pour le Président  Umaro Sissoco Embaló. Au lendemain de sa défaite, il a promis de respecter le choix des électeurs en nommant le premier ministre qui sera désigné par la nouvelle majorité parlementaire.  Cette dernière qui l’attend au tournant n’entend toutefois pas lui faire de cadeaux. 

Aussitôt les résultats proclamés, Muniro Conté, le porte-parole de la coalition PAI-Terra Ranka a déclaré devant une foule en liesse au siège du PAIGC:  « nous venons de réaliser une victoire historique. La seule chose que nous demandons cette fois-ci est qu’on nous laisse gouverner le pays ».

A mi-chemin de son premier mandat, un gouvernement de cohabitation est de mauvaise augure pour le Président Embaló qui aura encore moins de marge pour mettre en œuvre son programme de réformes et de relance économique. Déjà très critiqué à l’interne pour un leadership jusque-là plus porté à l’international, l’actuel Président en exercice de la Cédéao aura fort à faire pour faire avancer des réformes majeures dans un Parlement où il n’a pas la majorité. Critiqué également pour sa très grande addiction aux réseaux sociaux, la partie qui va commencer pour cette seconde mi-temps de son premier mandat s’annonce à hauts risques pour celui qui s’est jusque-là plus fait remarquer par sa forte propension à jouer les « médiateurs » à l’international comme en attestent sa tentative de s’impliquer dans la résolution de la crise russo-ukrainienne avec des visites à Kiev et à Moscou, ou se faisant l’avocat du Président tunisien Kaïs Saïed lors de sa virulente charge contre les migrants subsahariens. Désormais, c’est chez lui qu’il est le plus attendu pour mettre de l’ordre et surtout garantir le maintien de la fragile stabilité, condition sine-quanone pour espérer rebondir sur l’échiquier politique nationale et envisager avec plus de sérénité un second probable mandat à la tête de la Guinée-Bissau.   

Egypte : l’inflation sous-jacente grimpe à 40,3% en mai, dans un pays en pleine réforme

crédit : Dr

En Egypte, l’inflation sous-jacente, qui permet de dégager une tendance de fond de l’évolution des prix, a connu une importante hausse le mois dernier. Un indice des difficultés de l’économie Egyptienne fragilisée par la dévaluation de la monnaie, des pénuries devises étrangères entre autres. Le pays qui peine à retrouver l’équilibre financière depuis les troubles de 2011 a entamé une série de réformes soutenues notamment par le FMI.

L’inflation sous-jacente annuelle en Égypte est passée à 40,3 % en mai contre 38,6 % en avril, selon les données de la banque centrale publiées dimanche et relayées par l’agence Reuters. En effet, l’inflation a fortement augmenté au cours de la dernière année en Égypte après une série de dévaluations monétaires, une pénurie prolongée de devises étrangères et des retards persistants dans l’acheminement des importations vers le pays. D’un mois à l’autre, il est passé de 1,7 % en avril à 2,9 % en mai, selon les données. L’Égypte a dévalué sa monnaie de moitié depuis mars 2022 après que les retombées de l’invasion russe de l’Ukraine ont révélé ses vulnérabilités économiques.

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Le FMI a approuvé en décembre un prêt de 3 milliards de dollars au titre du mécanisme élargi de financement pour l’Égypte, qui sera décaissé sur 46 mois. Dans son accord de décembre avec le FMI, l’Égypte a également promis de céder des actifs publics évalués à des milliards de dollars au cours des quatre prochaines années. Mais, il n’a pour l’heure effectué aucune vente majeure depuis la signature, bien que la banque centrale ait relevé ses taux d’intérêt au jour le jour de 500 points de base. Les décaissements sont soumis à huit évaluations dont la première datait de 15 mars 2023, dans un rapport des services du FMI publié en décembre.

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Les chiffres de la banque centrale interviennent après que les données de l’agence de statistiques CAPMAS ont montré samedi que le taux d’inflation annuel de la consommation urbaine en Égypte en mai s’était accéléré à 32,7 % contre 30,6 % en avril, approchant un record absolu et est plus élevé que prévu par les analystes. D’un mois à l’autre, l’inflation urbaine a augmenté à 2,7 % contre 1,7 % en avril. L’économie égyptienne tente aujourd’hui de retrouver sa pleine croissance, avec un certain nombre de réformes, entamées par le président Al Sissi, à la suite de la période d’instabilité qui a suivi la révolution de 2011.

L’Egypte, une économie en pleine restructuration depuis 2011

En effet, les troubles de 2011 ainsi que les autres mouvements du printemps arabe, ont eu un impact significatif sur l’économie du pays. La période de turbulence politique et d’instabilité a entraîné une baisse de la confiance des investisseurs, une diminution des flux touristiques et une détérioration des indicateurs économiques. En 2011, le PIB égyptien a connu une contraction de 2% en raison de l’incertitude politique et des perturbations économiques. En 2012, la croissance économique a été de seulement 2,2%, bien en deçà des taux de croissance observés avant la crise. Cependant, au fil du temps, l’économie égyptienne a montré des signes de reprise. Le gouvernement a mis en œuvre des réformes économiques et structurelles visant à stimuler la croissance et à attirer les investissements étrangers. Certaines de ces réformes comprenaient la libéralisation du taux de change, la réduction des subventions aux carburants et la mise en place de mesures visant à améliorer le climat des affaires. Malgré ces progrès, l’économie égyptienne reste confrontée à des défis importants, tels que le chômage élevé, la pauvreté et des inégalités persistantes. La pandémie de COVID-19 a également eu un impact négatif sur l’économie, en raison de la baisse des activités commerciales et du tourisme international.

Chronique : Madagascar- Le Président Andry Rajoelina en France, les dessous d’une main tendue

Le Président Malgache Andry Rajoelina a rencontré ce week-end son homologue Français Emmanuel Macron à l'Elysée. (Crédit : Dr).

La grande île possède diverses ressources naturelles et de réels atouts économiques. Si sur certaines filières, elle caracole en tête, dans d’autres, des schémas laborieux ont freiné son développement. A sa tête depuis bientôt 5 ans, le Président Andry Rajoelina, ex-maire de la capitale, compte des tops mais aussi des flops. A l’Elysée ce week-end, il plancherait avec son hôte sur une coopération renforcée et surtout Win Win.

C’est un président jeune qui est à la tête de Madagascar. Andry Rajoelina est âgé à peine de 49 ans. Son élection à la magistrature suprême, le 18 janvier 2019, suscita énormément d’espoirs, tant son pays possède diverses ressources naturelles et atouts économiques qui peuvent contribuer à un essor économique réel. En dépit de son jeune âge, c’est un homme du pouvoir. Dix ans plutôt, en 2009, il avait été porté à la tête de la Haute autorité de la Transition de la République de Madagascar, après le coup de force qui déposa le président Marc Ravalomanana… Après un départ en trombe, au lendemain de ce mandat- entre autres bailleurs de fonds, le FMI a mis sur la table 292 millions $, puis 100 millions $, pour la réalisation d’infrastructures- ses efforts ont été atténués par les effets considérables de la pandémie Covid-19– qu’il renia longtemps, avant d’annoncer une médication locale (Covid Organics à base d’artémesia par IMRA) au succès surestimé- avec une contraction de l’économie de 7,1% en 2020. Dans cette perspective de développement d’infrastructures (réhabilitation des routes, autoroute sur la côte de l’océan Indien Antatanarivo-Tamatave, etc.), le Chef de l’Etat malgache compte poursuivre les investissements dans l’agriculture (canal d’irrigation de 100 km au profit des zones sud, accroissement de 25% de la production de riz…) et asseoir un tissu industriel solide pour soutenir la création de valeur ajoutée des produits et réduire les importations.

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Madagascar possède l’une des plus vastes zones économiques exclusives (ZEE) d’Afrique, couvrant environ 1,2 million km² dans l’océan Indien. Cela offre des possibilités pour l’exploitation durable des ressources marines, la pêche et le développement de l’aquaculture. Cette option va certainement orienter sa visite en France. Très actif sur Twitter, le Président Rajoelina a posté le 09 juin « Je remercie le Président @EmmanuelMacron pour son accueil chaleureux, son engagement en soutien aux initiatives pour appuyer l’émergence de #Madagascar. Nous renforcerons la coopération dans plusieurs domaines stratégiques, dont l’urgence climatique, en avant du Sommet, fin juin. »

L’agriculture, un pilier économique essentiel

Le pays ne manque pas d’atouts. Madagascar est connue pour sa biodiversité exceptionnelle, abritant une grande variété d’espèces endémiques. L’île possède des écosystèmes uniques, tels que les forêts tropicales, les mangroves, les récifs coralliens et les lacs, qui sont précieux du point de vue écologique et offrent des opportunités pour le tourisme écologique. Sur le volet agricole, Andry Rajoelina qui promeut la sécurité alimentaire s’appuie un potentiel avec des terres agricoles fertiles. Le pays est un important producteur et exportateur de produits agricoles, tels que la vanille (590 millions $, campagne 2021-2022), les fruits tropicaux (mangues, ananas, litchis), le café, le riz, les épices et les plantes médicinales. L’agriculture reste un pilier économique essentiel pour le pays. Aussi, Madagascar possède des ressources minérales significatives, notamment le graphite, le charbon, le nickel, le cobalt, le titane, le chrome et l’ilménite. Ces ressources minérales attirent l’investissement étranger dans l’industrie minière du pays. En termes d’énergie renouvelable, la Grande Île possède un fort potentiel, en particulier l’énergie hydroélectrique, éolienne et solaire. L’exploitation de ces sources d’énergie peut contribuer à réduire la dépendance du pays aux combustibles fossiles et à favoriser le développement économique durable. En dépit des promesses électorales, le secteur touristique, qui offre des opportunités inestimables, avec des paysages naturels exceptionnels, des plages pittoresques, des parcs nationaux, des réserves naturelles et une culture unique, gagnerait à être davantage accéléré. La tendance est certes prometteuse avec un secteur en plein essor et une source de revenus importante pour le pays, mais des programmes plus ambitieux sont à attendre.

Comment juguler une inflation rampante ?

Justement, le pays fait face à des défis économiques, tels que la pauvreté, l’insécurité politique et la faiblesse des infrastructures. La baisse des prix du carburant et de l’électricité promise en 2019 est devenue chimérique pour le premier cité. A la mi-2022, le prix du carburant à la pompe a bondi de 44%, (le litre de gasoil à 1500 Ar ou 0,36€, celui de l’essence sans plomb à 1800 Ar ou 0,44€). Quant à la production d’électricité, une gestion décriée de la JIRAMA (société malgache d’électricité et de distribution d’eau), avec des délestages récurrents, fait craindre des hausses…  L’exploitation efficace et durable de ses ressources naturelles ainsi que le développement d’industries clés sont essentiels pour stimuler la croissance économique et améliorer les conditions de vie de sa population. C’est à juste titre donc que les observateurs assurent que l’émergence économique présuppose l’accès gratuit à l’école jusqu’au Bac et au-delà, le développement de la formation professionnelle et de l’apprentissage, l’accès à l’eau potable, à une électricité continue… des utilités essentielles et non encore réalisées. Au tweet du président, un citoyen malgache, répondant au nom de Tenny répond « Je crois que vous aviez complètement oublié les Îles Eparses, vous aviez oublié tellement de choses, c’est dommage. », tandis qu’une certaine Tinah Christina, pour sa part, défend son président et note « J’apprécie personnellement vos efforts. ». Le moins qu’on l’on puisse dire est que Rajoelina a du pain sur la planche. Son jeune âge est un autre atout pour puiser dans une énergie alimentée de la révolution industrielle X.0 qui l’éloigne de quelconques influences, fussent-elles russes, françaises ou autres. C’est lui qui disait la semaine dernière à des confrères « L’Afrique ne veut pas recevoir de leçons des pays occidentaux. »

Etudes – Logistique portuaire : peu performants, comment les ports africains peuvent gagner en efficacité

L'indice CCPI qui a été mis à point par la Banque mondiale et S&P Global Market Intelligence a comparé les performances de 348 ports à conteneurs dans le monde selon leur efficacité en mesurant le temps écoulé entre l’arrivée en rade d’un navire et son départ du poste d’amarrage, une fois l’échange de cargaison effectué. (Crédit : Dr).

Dans la dernière édition du rapport de la Banque mondiale sur l’Indice mondial de performance des ports à conteneurs (CPPI) qui porte sur l’évaluation de près de 340 ports, les ports africains font pale figure et se classent parmi les moins performants du monde mis à part quelques exceptions qui peuvent servir de modèle. Alors que partout ailleurs, l’heure est à la reprise après les perturbations causées par la pandémie du Covid-19, de nombreux ports de la région pâtissent de la durée excessive des cycles de chargement ou de déchargement, faisant peser un risque constant de perturbation sur la chaîne logistique selon les auteurs. D’après les données du rapport, ils réussiraient à accroître la productivité et à améliorer la qualité des services en dématérialisant davantage les procédures et en modernisant les infrastructures. Des pistes qui peuvent également permettre aux pays africains d’améliorer leur performance en matière de logistique notamment portuaire.

La bonne nouvelle de cette édition 2023 de l’Indice mondial de performance des ports à conteneurs (CPPI) et qui porte sur les données de l’année 2022, c’est qu’on assiste à  une nette amélioration des conditions opérationnelles depuis les perturbations sans précédent causées par la pandémie de COVID-19. La mauvaise, c’est que les ports africains, assez peu compétitifs, restent peu performants mis à part quelques exceptions sur le continent. L’indice CCPI qui a été mis à point par la Banque mondiale et S&P Global Market Intelligence a comparé les performances de 348 ports à conteneurs dans le monde selon leur efficacité en mesurant le temps écoulé entre l’arrivée en rade d’un navire et son départ du poste d’amarrage, une fois l’échange de cargaison effectué. Il vise ainsi à identifier les lacunes des infrastructures portuaires commerciales et à formuler des recommandations qui profiteraient à tous les acteurs clés du commerce mondial : États, compagnies maritimes, opérateurs de ports et de terminaux, affréteurs, entreprises de logistique et consommateurs.

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Entre autres points saillants du rapport, le port chinois de Yangshan qui arrive en tête de classement, malgré la survenue de typhons et d’autres facteurs qui ont désorganisé son fonctionnement en 2022.  En dehors du port de Yangshan, le rapport indique à nouveau cette année la bonne performance des installations du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. Trois ports de la région occupent les cinq premières places du classement, la deuxième revenant à Salalah (Oman), la troisième à Khalifa (Abou Dhabi) et la quatrième à Tanger Med (Maroc). Selon le rapport, les ports d’Amérique latine ont aussi progressé. En Colombie, le port de Carthagène ressort désormais à la 5e place, tandis que le port de Posorja, en Équateur, occupe le 19e rang du classement.  En Asie du Sud-Est, Tanjung Pelepas (Malaisie) se hisse au 6e rang, tandis que Cai Mep (Viet Nam) et Singapour pointent respectivement à la 12e et 18e places.  Pour l’Europe, le port d’Algésiras (Espagne) arrive en tête, à la 16e place, tandis qu’en Amérique du Nord, les deux ports les mieux classés sont Wilmington, en Caroline du Nord (44e) et le port de Virginie (52e). Le port de Berbera, à la 144e place, est le plus performant d’Afrique subsaharienne. De nombreux ports de la région pâtissent de la durée excessive des cycles de chargement ou de déchargement, faisant peser un risque constant de perturbation sur la chaîne logistique.

« Il est indispensable d’accroître la performance des ports d’Afrique pour libérer la croissance et le développement du continent. Ces ports sont autant de points d’accès vitaux pour le commerce et les échanges ; leur efficacité contribue à la sécurité alimentaire et constitue également un facteur déterminant pour le plein épanouissement économique de l’Afrique », a déclaré Martin Humphreys, économiste principal spécialisé dans les transports à la Banque mondiale.

Investissements dans les infrastructures et dématérialisation des procédures pour gagner en compétitivité

Selon le rapport, partout dans le monde, les ports continuent de récupérer leur retard et de se remettre des difficiles perturbations causées par la pandémie de Covid-19. « Les difficultés causées par la pandémie de Covid-19 et ses conséquences sur le secteur se sont atténuées en 2022, une atténuation qui s’est poursuivie au début de l’année 2023. Cela s’est traduit par une amélioration de la congestion portuaire et une réduction des perturbations logistiques, qui a eu un impact positif sur la performance et le classement de certains ports », ont indiqué les auteurs du rapport pour qui, ils pourraient toutefois gagner en efficacité dans certains domaines. Et d’après les données du rapport, ces ports réussiraient à accroître la productivité et améliorer la qualité des services en dématérialisant davantage les procédures et en modernisant les infrastructures et cela leur permettrait également de réduire les émissions polluantes. Des mesures qui valent particulièrement pour les ports africains d’autant que comme l’a fait ressortir un autre rapport de la Banque mondiale sur l’Indice de performance logistique, qui mesure la capacité des pays à assurer une circulation internationale des marchandises dans des délais rapides et avec fiabilité, la numérisation des procédures s’accompagne de véritables gains de compétitivité en matière de commerce internationale.

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Selon l’Indice CPPI, le Port de Tanger Med est classé à la 4e position du top 10 des ports à conteneurs les plus performants en Afrique en 2022. La méga-plateforme marocain, qui a progressé de deux rangs par rapport au classement 2021, confirme ainsi sa forte croissance portée par une amitieuse volonté politique qui s’est traduite par des investissements massifs  pour développer le complexe portuaire sur lequel est actuellement en train d’être érigée un quatrième terminal à conteneurs (TC4) pour une enveloppe de plus de 800 millions de dollars. De quoi accroitre les capacités du port qui se positionne également par ses performances, qui en font l’un des plus attractifs de la région et permet également de renforcer la connectivité du Maroc en matière de logistique.

Améliorer la performance portuaire pour renforcer l’attractivité logistique

Cette stratégie peut servir de modèle pour les autres places portuaires du continent afin qu’ils puissent pleinement tirer profit de la croissance attendue du commerce international.  Le défi pour les pays africains, au delà de la stratégie portuaire, c’est de pouvoir améliorer le secteur de la logistique, un véritable défi en matière d’intégration et à l’heure où des retombées sont attendues de l’ouverture du marché africain avec la Zlecaf ainsi que d’une intégration plus poussée des pays africains dans le commerce mondial. « La logistique est la pierre angulaire du commerce international, et le commerce est quant à lui un puissant moteur de la croissance économique et de la réduction de la pauvreté», explique ainsi Mona Haddad, directrice mondiale pour le commerce, l’investissement et la compétitivité à la Banque mondiale, dans la dernière édition du rapport « Connecting to Compete« , publié il y a quelques semaines. L’édition 2023 de l’indice de performance logistique qui aide les pays en développement à recenser les domaines dans lesquels des améliorations peuvent être apportées pour stimuler la compétitivité, a été publiée après trois années de perturbations sans précédent des chaînes d’approvisionnement pendant la pandémie de COVID-19, au cours desquelles les délais de livraison se sont démesurément allongés. Couvrant 139 pays, l’indice  mesure la facilité avec laquelle il est possible d’établir des connexions fiables entre les chaines d’approvisionnement ainsi que les facteurs structurels qui le permettent, tels que la qualité des services logistiques, les infrastructures commerciales et de transport, et les contrôles aux frontières.

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En moyenne, a fait ressortir dans lequel les pays africains arrivent également dans la dernière catégorie du classement, sur l’ensemble des axes commerciaux potentiels, 44 jours s’écoulent entre le moment où un conteneur entre dans le port du pays exportateur et celui où il quitte le port de destination, avec un écart type de 10,5 jours. Pendant 60 % de ce temps le conteneur est chargé sur un navire. Selon le rapport 2023, la numérisation de bout en bout des chaines d’approvisionnement, en particulier dans les économies émergentes, permet à ces pays de réduire jusqu’à 70% les délais des opérations portuaires par rapport à ceux des économies développées. Selon les données du rapport, on observe par ailleurs une hausse de la demande en faveur de chaînes logistiques « vertes », 75 % des expéditeurs de marchandises privilégiant désormais des options respectueuses de l’environnement pour leurs exportations vers les pays à revenu élevé. « Si la majeure partie du temps est consacrée à l’expédition, les retards les plus importants se produisent dans les ports maritimes, les aéroports et les installations multimodales. Par conséquent, les politiques portant sur ces installations peuvent contribuer à améliorer la fiabilité »,a souligné Christina Wiederer, économiste senior au département Macroéconomie, commerce et investissement du Groupe de la Banque mondiale et coautrice du rapport. Ces mesures consistent notamment à améliorer les processus de dédouanement, investir dans les infrastructures, recourir aux technologies numériques et promouvoir des chaînes logistiques durables sur le plan environnemental en se tournant vers des modes de transport de marchandises à moindre intensité de carbone et des solutions d’entreposage plus économes en énergie.

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